Pourquoi faudrait-il systématiquement passer chez le médecin pour obtenir un arrêt de travail quand on sait qu'on sera rapidement remis sur pied ? Dans un rapport publié lundi, la Cour des comptes suggère aux politiques d'« explorer » l'idée de supprimer les certificats médicaux pour les arrêts de travail de « très courte durée ». En pratique, les patients pourraient autodéclarer leur arrêt de travail.

Cette procédure permettrait aux médecins de ne pas perdre de temps et de se concentrer sur les patients qui ont le plus besoin de soins alors que les Français peinent souvent à décrocher rapidement une consultation médicale et que, selon la Cour, les politiques mises en place ces dernières années pour améliorer l'accès aux soins peinent à porter leurs fruits.

L'exemple du Royaume-Uni

Cette évolution a déjà été proposée par un syndicat de jeunes médecins et remplaçants, ReAGJIR. Notant que les consultations « dédiées à attester l'évident, sans plus-value médicale ni soins prodigués » sont « nombreuses », celui-ci estimait l'été dernier que la suppression les certificats obligatoires pour les arrêts courts devrait « permettre de libérer des milliers de consultations qui pourraient être redirigées vers un véritable rôle de soin ».Pour limiter la propagation du Covid, l'Assurance Maladie avait mis en place des arrêts de travail autodéclaratifs et indemnisés dès le premier jour entre 2021 et 2023. Tirant à la hausse le nombre d'arrêts. Le fait qu'en dehors d'un contexte de crise, un tel système retienne l'attention de la Cour des comptes pourrait toutefois faire grincer des dents les entreprises « Ça existe ailleurs et cela marche », a cependant souligné lundi le premier président de la Cour, Pierre Moscovici. « Dans le paysage français cela paraît surprenant, mais ce principe d'autodéclaration des arrêts de courte durée est en vigueur depuis de nombreuses années dans plusieurs pays proches », a encore souligné le patron de l'institution, citant les cas du Royaume-Uni, de la Norvège, de la Suède ou encore de la Belgique. Dans son rapport, la Cour met ainsi en avant le cas du Royaume-Uni, où les travailleurs malades peuvent autocertifier un arrêt de travail de moins de 7 jours en remplissant un formulaire fournissant entre autres les motifs médicaux de l'absence. « Il n'y a aucun abus particulier qui est observé », a souligné Pierre Moscovici.

Jours de carence

« Il va de soi qu'un tel positif ne peut être mis en place sans un système de régulation », s'est toutefois empressé d'ajouter le premier président de la Cour. A ce stade, celle-ci se garde de formuler une véritable « recommandation » sur le sujet, qui nécessite un « travail complémentaire important ». Pour éviter que l'autodéclaration des arrêts de travail ne s'accompagne d'une envolée de ces arrêts et de leur coût, la Cour évoque entre autres des mécanismes de régulation « dans les entreprises ou leurs branches, voire au niveau national ». Avec par exemple, la mise en place d'un délai de carence « d'ordre public » d'un ou deux jours. Une idée déjà envisagée par l'exécutif. La Sécurité sociale verse aujourd'hui des indemnités après un délai de carence de trois jours. En pratique cependant, de nombreux salariés sont protégés contre la perte de revenu dès le premier jour par leur entreprise. Le Medef et la CPME ont donc proposé l'an dernier d'instaurer [LinkText]un jour de carence d'ordre public[/LinkText][URL]https://www.lesechos.fr/economie-france/social/le-patronat-veut-reduire-lindemnisation-des-arrets-de-travail-1954105[/URL] qui ne serait ni indemnisé par les entreprises ni par la Sécurité sociale. Une façon, selon eux, de limiter les « arrêts de travail de complaisance », en faisant en sorte que les salariés qui s'arrêtent en ressentent financièrement les effets. Le sujet est cependant politiquement explosif, tout autant que l'idée, régulièrement évoquée ces derniers mois, d'allonger le délai de carence au delà duquel la Sécurité sociale intervient pour protéger les salariés contre la baisse des revenus.