La réindustrialisation est un chantier prioritaire d'Emmanuel Macron. Alors que, jusqu'ici, l'Elysée mettait en avant les indicateurs de l'observatoire Trendeo pour évaluer les ouvertures et fermetures d'usines, l'exécutif a décidé de reprendre la main. Profitant du Salon Global Industrie, il a dévoilé mercredi son baromètre pour mesurer l'évolution industrielle du pays, un nouvel outil mis au point au terme de plus de deux ans de travaux pilotés par la Direction générale des entreprises du ministère de l'Economie.

Les indicateurs de Trendeo étaient « très utiles » mais « souffraient d'un biais méthodologique », explique le cabinet du ministre de l'Industrie et de l'Energie. D'une part, ils ne se limitent pas au seul champ industriel « puisque Trendeo intègre les entrepôts logistiques et les activités de service ». D'autre part, ils reposent sur des annonces publiques, et certains mouvements « passaient sous les radars ». L'exécutif a donc choisi de solliciter les services de l'Etat pour qu'ils fassent remonter les données du terrain, les opérations quelles qu'elles soient - ouvertures, fermetures mais aussi extensions et réductions de sites - nécessitant des autorisations administratives.

Le premier bilan montre que la dynamique est restée positive l'an dernier. Au total, 57 nouvelles usines (soit le solde des ouvertures et des fermetures) ont ouvert, contre 49 en 2022. Si l'on tient compte des agrandissements de sites, ce chiffre monte même à 201, contre 176 un an plus tôt. Entre l'envolée des prix de l'énergie, les taux d'intérêt élevés et une concurrence exacerbée entre pays, l'environnement s'est néanmoins durci, et au second semestre, le mouvement a ralenti avec 79 opérations, contre 122 au premier. « La réindustrialisation en France, ce ne sont pas uniquement des nouveaux sites. C'est aussi une base industrielle qui continue d'étendre ses capacités », se félicite toutefois le ministère.

Les séquelles du Covid

L'emploi industriel augmente d'ailleurs, lui aussi, en valeur absolue avec « 130.000 emplois industriels créés depuis 2017 », note-t-il. Sur la seule année 2023, l'effectif total des entreprises de l'industrie manufacturière a augmenté de 1,8 %, selon un bulletin récent de la Banque de France. Mais la production industrielle, elle, n'en recueille pas encore les fruits. En février, elle restait légèrement inférieure à son niveau de 2015, et était à peine supérieure s'agissant de l'industrie manufacturière. Certains pans de l'industrie restent marqués par les séquelles du Covid. Notamment l'aéronautique, dont la production demeure inférieure de 25 % à son niveau d'avant-pandémie, ou l'automobile.

Le baromètre montre néanmoins l'afflux des investissements dans certains secteurs. L'agroalimentaire est celui qui a vu surgir le plus grand nombre d'implantations nouvelles ou d'extensions, 47 au total. Suivent l'industrie verte et l'économie circulaire avec 29 opérations, puis les transports (22) et la santé (20). La métallurgie qui avait été pénalisée en 2022 par la crise de l'énergie a, elle aussi, acquis des capacités de production supplémentaires. En revanche, les autres secteurs énergivores sont moins bien lotis. Le secteur du papier-carton affiche un solde négatif (-1), tandis que le nombre d'installations dans la plasturgie stagne.

Le paysage se recompose également. L'Auvergne-Rhône Alpes sort grande gagnante, avec 73 opérations, suivie de la Nouvelle-Aquitaine. Les deux régions concentrent la moitié des ouvertures nettes. Les Hauts-de France affichent en revanche le plus fort solde négatif (-9), pénalisés par les fermetures de sites dans les industries traditionnelles.