Déclin des hypermarchés
La « proxi », comme l'appellent les professionnels, réalise 10,9 % du chiffre d'affaires de la grande distribution, contre 10,4 % en 2019, une progression égale à celle des discounters Lidl et Aldi, qui multiplient eux-mêmes les ouvertures les rapprochant des consommateurs. Dans le même temps, les hypermarchés ont perdu 2,5 %, à 36,5 %. L'époque est révolue où un Français sur deux effectuait ses emplettes du quotidien dans une très grande surface.Tous les groupes développent leurs réseaux de proximité, en franchise. Casino, par exemple, a ouvert 900 Petit Casino, Vival et Spar l'an passé. L'appétit de proximité se traduit aussi par le regain d'intérêt pour les commerces de bouche traditionnels, les bouchers et primeurs de quartier. Circana note une croissance de leurs ventes de 45 % en trois ans, et encore de 7 % depuis 2021. L'étude ne chiffre pas le poids des marchés dits « de plein air ». Les commerces de bouche représentent désormais 13 % des ventes alimentaires, contre 10 % en 2019.
« Avec Mytraffic, qui suit les détenteurs de smartphones, nous constatons une baisse de la mobilité des Français, qui, grâce au télétravail partiel [29 % de la population active, NDLR], consomment plus près de chez eux », note Emily Mayer, analyste en chef chez Circana. Les centres-villes commerçants ont enregistré une érosion de 6 points du nombre des visiteurs extérieurs. A l'inverse, les commerces des zones résidentielles ont gagné 3 points de fréquentation.Les cartes parlent. En trois ans, le coeur de Paris a perdu 1,5 % de chiffre d'affaires en alimentaire quand les portes de la capitale en ont gagné 5 %. L'étude estime à 2 % la perte des quartiers de bureaux. A l'échelle du pays, les métropoles fléchissent toutes, à l'exception des banlieues familiales ou des grandes couronnes (+15 %), quand les bassins de consommation ruraux ou semiruraux progressent.Marques de distributeur
Le prix de l'essence dissuade de nombreux déplacements, même si les commerces de proximité sont plus chers de 18 % en moyenne. « On y va plus souvent, ainsi on contrôle ses dépenses presque au jour le jour », commente Emily Mayer. Pour amortir l'inflation, les petits supers étendent leur offre de marques de distributeur, qui atteint 36,5 % des références, contre 23,4 % dans les hypers. La proximité rurale croît plus que la proximité urbaine (+18 % depuis 2019 contre 14 %). Les lieux de villégiature depuis lesquels on travaille à distance « au pays des vacances » comme le clame la ville de La Baule, en Loire-Atlantique, suivent le même rythme.
Une autre tendance renforce le commerce de proximité : la livraison. Depuis les restaurants et les supermarchés, Uber Eats et Deliveroo apportent 8 milliards d'euros de repas chaque année aux Français, un doublement depuis 2019. Et les paniers à cuisiner comme Quitoque, filiale de Carrefour, génèrent 760 millions d'euros de chiffre d'affaires, soit plus que les livraisons des Monoprix Plus et autres Leclerc chez moi. Il n'y a pas de plus grande proximité que la livraison de ses courses à domicile.