Les syndicats vont arriver avec des arguments chiffrés rue de Grenelle pour rencontrer la ministre du Travail, Catherine Vautrin, à partir de ce mercredi. A quelques jours du démarrage des concertations sur la réforme de l'assurance-chômage, l'Unédic a en effet présenté, à leur demande, des estimations sur l'impact qu'auraient un certain nombre de mesures d'économies envisagées par le gouvernement après l'échec des négociations entre les partenaires sociaux.

Ont en particulier été testés, à comportement inchangé, un durcissement des conditions d'ouverture des droits à indemnisation, un déclenchement de l'indemnisation plus tardif après la fin du contrat de travail et des restrictions sur la filière seniors.

Les plus fragiles les plus touchés

Concernant les conditions d'ouverture des droits, actuellement il faut justifier de 6 mois au moins de travail salarié dans les 24 derniers mois pour être indemnisé. L'Unédic a testé une hausse de cette durée minimale d'activité à 7, voire 12 mois. De 11 à 31 % des allocataires seraient impactés et de 5 à 23 % verraient le déclenchement de leur allocation reporté de plus d'un an. Cela toucherait surtout les publics les plus fragiles : jeunes de moins de 25 ans, allocataires les moins bien indemnisés (sous 1.400 euros brut) et fins de contrat précaire. Les économies procurées sont évaluées entre 400 millions et 2,3 milliards d'euros. Elles seraient nettement amplifiées si le gouvernement décidait aussi de réduire la période de référence pour le calcul des mois d'activité.Le régime d'assurance-chômage a donc travaillé sur un passage des 24 mois actuels à 18 mois, ce qui est un peu plus restrictif que les 20 mois envisagés par l'exécutif. De 13 à 32 % des chômeurs indemnisés seraient touchés. Le résultat d'un double effet : le décalage du déclenchement des droits - de 7 à 26 % des personnes verraient leurs droits reportés de plus d'un an -, ainsi qu'une diminution de la durée maximale d'indemnisation des salariés ayant alterné activité et chômage avant de s'inscrire à France Travail puisque ne seraient plus prises en compte les périodes de travail plus anciennes.L'économie engendrée serait massive : de 5,1 milliards d'euros pour 7 mois d'activité dans les 18 derniers mois à 7,5 milliards pour 12 mois toujours dans les 18 derniers mois, a chiffré l'Unédic. A titre de comparaison, les dernières prévisions du régime font état d'un excédent de 4,7 milliards d'euros en 2024 et de 8,6 milliards en 2025.

L'Unédic a par ailleurs testé un durcissement du « différé spécifique », qui concerne les salariés dont l'indemnité de rupture est supérieure au minimum fixé par la loi. Une clé de répartition convertit ce dépassement en jours de carence avec un plafond fixé actuellement à 2,5 mois pour les licenciements économiques et 5 mois dans les autres cas. En 2023, 240.000 nouveaux allocataires, soit 10 % d'entre eux, ont été concernés par ce dispositif.

Son doublement toucherait un peu moins de 26.000 autres nouveaux demandeurs d'emploi (dont 6.300 licenciés économiques), pour beaucoup parmi les mieux indemnisés. La mesure pénaliserait moins de chômeurs, mais rapporterait aussi beaucoup moins que les restrictions à l'ouverture de droits : un peu plus de 450 millions en année pleine.Enfin, l'Unédic a évalué l'incidence qu'aurait l'application de l'allongement de deux ans de l'âge légal de la retraite aux bornes de l'assurance-chômage. Ce décalage provoquerait une baisse de 15.000 allocataires indemnisés chaque mois et une économie de 270 millions d'euros en régime de croisière, soit après cinq ans de montée en charge.

La suppression pure et simple de la filière (non envisagée) rapporterait, elle, 4 fois plus d'économies, à 1,2 milliard par an, selon l'Unédic, sachant que le gouvernement avait fixé aux partenaires sociaux commeobjectif de réduire les dépenses de la filière de 400 millions d'euros.