Le nouveau gouvernement n'est pas encore connu, mais à lire les dernières prévisions de l'Insee publiées lundi, il ne pourra pas compter sur une période de grâce. Après avoir déjà revu à 0,2 % contre 0,3 % la croissance tricolore au printemps, l'institut de la statistique a en effet légèrement abaissé ses projections pour le second semestre de l'année 2024.

Selon ses nouvelles estimations, l'économie française, portée par les Jeux Olympiques de Paris, progresserait de 0,4 % au troisième trimestre, et non pas de 0,5 % comme il l'envisageait en juillet. Elle se contracterait ensuite de 0,1 % au quatrième trimestre. La croissance française ressortirait néanmoins à 1,1 % cette année, soit un peu plus que ce que prévoyait le gouvernement Attal (1 %).

Une contribution de 0,9 point au PIB

A l'heure de s'atteler à la préparation du budget 2025, le nouveau Premier ministre Michel Barnier va donc devoir composer avec une activité sans élan au vu de laquelle la prévision d'une hausse du PIB de 1,4 % l'an prochain inscrite dans le programme de stabilité transmis à Bruxelles semble déjà caduque. Dans une note publiée la semaine dernière, le Trésor fait d'ailleurs état d'une nouvelle prévision de croissance de 1,1 % pour 2024 et 2025. Les orientations budgétaires du futur gouvernement auront en outre un impact sur la trajectoire économique du pays.

Pour l'Insee, en 2024, c'est le commerce extérieur qui doit assurer l'essentiel de la croissance en contribuant à hauteur de 0,9 point au PIB. Si les JO devraient apporter leur écot avec des revenus tirés du tourisme, cette performance tient surtout au dynamisme des livraisons aéronautique et navale à l'étranger. Un soutien dont l'Hexagone devrait encore bénéficier l'an prochain.

L'évolution de la demande intérieure apparaît, quant à elle, nettement plus incertaine. « Au deuxième trimestre, elle a été à l'arrêt pour le troisième trimestre consécutif », rappellent les prévisionnistes de l'Institut de la statistique. Une fois retirée la dynamique des JO, l'activité a été un peu plus faible que prévu, notent-ils par ailleurs. Le climat d'incertitude politique des derniers mois a laissé des traces. « Les entreprises ont appuyé sur le frein . Dans les enquêtes, elles sont de plus en plus nombreuses à déclarer revoir à la baisse leurs projets d'investissement », a commenté Dorian Roucher, chef du département conjoncture de l'Insee, qui observe que les carnets de commandes dans des secteurs comme les biens d'équipement ou l'information communication sont « beaucoup moins garnis ».

Déjà en recul en début d'année, bridé par le coût élevé du crédit, l'investissement des entreprises devrait ainsi continuer à reculer au cours des prochains mois. L'Insee indique aussi que la baisse de la production céréalière pourrait coûter 0,1 point de croissance cette année.

A contrario, la consommation des ménages devrait enfin sortir de sa léthargie grâce aux gains de pouvoir d'achat. De fait, la désinflation se poursuit plus rapidement que prévu. En fin d'année, la hausse des prix pourrait s'établir à 1,6 %, soit un quasi-retour à la normale, malgré quelques tensions persistantes sur les prix de certains services. Résultat, les prix augmentent désormais moins vite que les salaires. Les prestations sociales ont, elles aussi, été réévaluées.

Dans ce contexte, la revalorisation du SMIC à l'automne est en revanche devenue « incertaine », a reconnu Dorian Roucher. Il faudra attendre la publication vendredi du chiffre d'inflation définitif au mois d'août pour savoir ce qu'il en est.En attendant, la détente des taux d'intérêt commence, elle aussi, à produire des effets. L'appétit des Français pour l'immobilier semble enfin se réveiller même si le niveau des transactions reste bas. Pourrait suivre une reprise des mises en chantier des logements neufs. Les chefs d'entreprise, quant à eux, risquent néanmoins de se montrer encore attentistes, soucieux d'en savoir plus sur les orientations fiscales et budgétaires du nouveau gouvernement avant de se remettre à investir.