En 2022, l'Hexagone est resté la destination préférée en Europe des entreprises étrangères pour la quatrième année consécutive, selon le baromètre EY publié ce jeudi. Mais un sentiment de prudence est en train de gagner les investisseurs s'agissant de l'avenir. Il y a un an, trois quarts d'entre eux considéraient que l'attractivité de la France allait s'améliorer. Ils ne sont plus que 53 % à le penser, selon l'enquête. « A trois ans, les intentions de vote en faveur de la France chute de 20 points », alerte Marc Lhermitte, associé chez EY.

Les tensions sociales récentes et l'incertitude politique créée par l'absence de majorité à l'Assemblée nationale ont pu contribuer à ce changement d'humeur. Une analyse contestée toutefois par Laurent Saint-Martin, le directeur général de Business France, qui y voit plutôt le reflet de la crise énergétique subie par l'Europe, et donc la France. Selon l'enquête d'EY, seuls 17 % des investisseurs ont choisi de déplacer leur production hors du Vieux Continent pour échapper à la flambée des prix. Mais le danger reste réel.

Les Etats-Unis font figure de redoutable compétiteur avec leur énergie moins chère et les subventions massives prévues par l'Inflation Reduction Act (IRA). « Les Britanniques ont très envie de revenir dans le jeu », pointe Marc Lhermitte. La part des investisseurs interrogés par EY annonçant un projet de relocalisation dans l'Hexagone recule de 5 points par rapport à 2021.

Un travail de pédagogie auprès des élus locaux

La France aborde cette phase délicate avec toujours les mêmes faiblesses : elle fidélise mais a du mal à susciter des projets nouveaux sur son territoire, contrairement au Royaume-Uni ou à l'Allemagne où ces « greenfields », dans le jargon, sont majoritaires. Elle est à la peine pour attirer les centres de décisions étrangers. Ces derniers représentent tout juste 6 % des projets accueillis en 2022, un ratio en baisse de 16 % sur un an.Autre point faible : les investissements réalisés dans l'Hexagone créent moins d'emplois qu'ailleurs : 33 en moyenne, contre 59 en Allemagne et au Royaume Uni. En cause, selon EY, la législation sociale, jugée encore complexe, et le coût du travail : 41,80 euros l'heure travaillée contre une moyenne de 34,20 euros dans la zone euro, estime Rexecode.

Enfin, la disponibilité du foncier et la complexité et la lenteur des procédures restent des talons d'Achille dont se plaignent régulièrement les investisseurs étrangers, et auxquels doit s'attaquer la prochaine loi Industrie verte. Au-delà, « la question de l'acceptabilité des projets sur le terrain se pose », pointe Marc Lhermitte. Il faut « un travail de pédagogie auprès des élus locaux si on veut réindustrialiser le pays » prévient-il. Près d'un projet d'investissement étranger sur deux concerne des zones rurales ou des agglomérations moyennes.