C'est une épaisseur du trait annonciatrice d'un changement de cycle attendu et redouté depuis quelques mois : la Fédération française du bâtiment (FFB) s'attend désormais à un repli de l'activité sectorielle au global de 0,2 % en volume en 2023. Elle prévoyait initialement - à la fin de l'an dernier - une hausse de 0,7 %, après une croissance de 3,1 % en 2022. En clair, « le bâtiment entre en récession » et les deux voire trois prochaines années à venir s'annoncent terribles, selon le président de la FFB, Olivier Salleron, « si rien n'est fait ».La FFB, qui a dévoilé mercredi sa dernière enquête de conjoncture, a d'ailleurs noirci davantage encore une perspective déjà sombre à horizon 2025, tablant sur la perte de 150.000 emplois. Elle avait évoqué, en avril dernier, la suppression de « près de 100.000 postes » à horizon 2024-2025. La machine à créer de l'emploi, qui tournait à plein régime depuis plus de deux ans, va même s'arrêter net dès 2023, prévient-elle. L'an dernier, le secteur en avait généré 19.600 supplémentaires.Par ailleurs, la fédération chiffre à 14 milliards d'euros le manque à gagner en chiffre d'affaires pour le secteur en 2025, la croissance du marché de la rénovation (+6 milliards d'euros) n'étant pas en mesure de compenser l'effondrement du « neuf » (820 milliards).
Chute de la construction de logements
En la matière, c'est bien entendu la chute de la construction de logements, en repli en volume de 5,1 % cette année - après une hausse de 2,8 % en 2022 -, qui se fera le plus durement sentir. La baisse des mises en chantier et des autorisations, soit les chantiers à venir, s'amplifie. A la fin juillet, précise la FFB, le recul des autorisations pour le logement collectif atteint ainsi 29,3 % sur les trois derniers mois, soit une dégradation de près de cinq points par rapport à leur niveau sur sept mois (-24,5 %). En outre, déplore la FFB, « le non résidentiel déçoit » avec des perspectives négatives dans divers domaines : bureaux ; bâtiments agricoles ; hôtellerie.Son président souligne toutefois « le redémarrage de la commande publique », compte tenu, estime-t-il, d'élections municipales qui se rapprochent (2026). L'activité est en effet tonique dans la construction de bâtiments administratifs avec un bond, à la fin juillet et sur trois mois, de près de 13 % des chantiers engagés, et une croissance de 8 % des « surfaces autorisées ». Autre note encourageante : l'activité à venir grossit pour les bâtiments industriels.En parallèle, le marché des travaux d'amélioration-entretien, qui a suscité un peu d'inquiétude en cours d'année au vu de son ralentissement, reste soutenu. A ce propos, la FFB salue le renforcement du dispositif MaPrimRénov' et le lancement, à partir du 1er janvier, de Ma Prime Adapt pour l'aménagement du logement des personnes âgées. Son président se félicite aussi du plan de rénovation des écoles, et celui visant à embellir les zones commerciales « moches », « une bonne nouvelle pour dans cinq ans, dix ans, quinze ans »…Défaillances
Pour autant, la FFB, à l'unisson avec les professionnels du logement, attend surtout, dans l'immédiat, « des mesures simples et efficaces » pour relancer le logement neuf afin d'éviter, insiste son président, « une catastrophe sur deux, trois, quatre ans ». De fait, le nombre de défaillances progresse. « Le président de la République a annoncé un (nouveau) plan logement. On en a un. Il est prêt depuis des mois », observe, caustique, Olivier Salleron.S'agissant de l'accès à la propriété, la fédération plaide notamment pour le maintien du prêt à taux zéro dans sa configuration actuelle tandis que le gouvernement a annoncé son recentrage en faveur des zones dites tendues. Concernant la rénovation, la fédération s'alarme par ailleurs d'une éventuelle remise en cause de la TVA réduite pour certains travaux. Mais, juge Olivier Salleron, « les jeux ne sont pas faits » pour le projet de loi de finances 2024. Comprendre : mobilisation en vue auprès des parlementaires.