Dans la campagne de Mormant-sur-Vernisson, l'événement a été baptisé "La fête de la victoire": celle remportée ce 9 juin 2024, il y a un an jour pour jour, par le Rassemblement national lorsque sa liste est arrivée en tête du scrutin européen en recueillant 31,37% des suffrages, à l'époque le meilleur score de l'histoire du parti d'extrême droite lors d'un premier tour.

Plus de 5.000 personnes sont attendues au milieu des food-trucks et stands de glaces, alors qu'une contre-manifestation est prévue à Montargis, à une dizaine de kilomètres, où sont notamment attendus les parlementaires Philippe Brun et Chloé Ridel (PS), Ian Brossat (PCF), Manon Aubry et Louis Boyard (LFI), ainsi que plusieurs leaders syndicaux dont Sophie Binet (CGT) et Marylise Léon (CFDT).

De leur côté, les lepénistes ont convié le Premier ministre hongrois, Viktor Orban. "Les bureaucrates bruxellois (souhaitent) la soumission et le déclin (...), qu'il s'agisse d'installer des migrants, de financer la guerre ou de partager la dette", a-t-il publié dimanche sur les réseaux, en faisant une référence à Montargis, théâtre de violences urbaines il y a deux ans, selon lui "un exemple à petite échelle de ce (...) qui se passe lorsque les patriotes perdent le contrôle et que la tête du gouvernement est confiée à ceux qui servent des intérêts étrangers".

Sont également attendus le vice-président du Conseil des ministres italien Matteo Salvini, le leader du parti espagnol Vox, Santiago Abascal, ainsi que les dirigeants des partis alliés tchèque, Andrej Babis, grec, Afroditi Latinopoulou, polonais, Krzysztof Bosak, estonien, Martin Helme, et belge, Tom Van Grieken.

Tous entendent convaincre de leur poids au Parlement de Strasbourg, réunis sous la bannière "Patriotes pour l'Europe" (85 eurodéputés sur 720), bien que concurrencés par deux autres groupes d'extrême droite, notamment les Conservateurs, parmi lesquels siègent les élus de Fratelli d'Italia, le parti post-fasciste de la cheffe du gouvernement transalpin Giorgia Meloni.

De précédents raouts avec ces alliés, notamment en janvier à Madrid, avaient par ailleurs mis au jour la grande hétérogénéité idéologique de ces "Patriotes" du Vieux continent, Marine Le Pen apparaissant par exemple à contre-courant du trumpisme béat de ses partenaires ou de leurs saillies ultra-conservatrices.

Est-ce cette fois-ci pour prévenir tout couac qu'elle et Jordan Bardella se sont réunis dimanche après-midi à Fontainebleau (Seine-et-Marne), pour une "réunion de travail" à huis clos?

- Poison lent -

La garden party de lundi doit de toute façon s'articuler autour d'enjeux principalement franco-français et illustrer la solidité du "duo" Le Pen-Bardella.

Car l'anniversaire des européennes du 9 juin coïncide également avec celui de la dissolution, point de départ d'une campagne législative initialement jugée gagnable - voire imperdable -, mais qui s'est fracassée sur un casting hasardeux de candidats dans des dizaines de circonscriptions et un "front républicain". Au final, le RN est parvenu à faire élire 120 députés, très loin des 289 nécessaires pour envoyer M. Bardella à Matignon.

Un an après, l'aspirant Premier ministre de 2024 a changé de statut, à présent candidat putatif à la présidentielle si l'inéligibilité de Marine Le Pen devait être confirmée par la Cour d'appel à l'été 2026.

Le coup de tonnerre provoqué par cette condamnation, le 31 mars dernier, a sérieusement ébranlé le "ticket" qu'avait mis sur pied la députée du Pas-de-Calais. Le "plan B comme Bardella"? C'est toujours elle la "candidate", ne cesse-t-elle de rappeler pour minimiser l'hypothèse, sans cacher son exaspération envers "ceux qui veulent l'enterrer trop tôt".

Reste que le succès de son livre en librairie, sa popularité et, surtout, ses intentions de vote comparables à celle de sa "patronne", ont propulsé Jordan Bardella dans le cercle fermé des "présidentiables". 

L'idée, notamment relayée par la presse d'extrême droite qui n'a jamais caché sa préférence pour le bientôt trentenaire plutôt que pour Marine Le Pen, agit depuis deux mois comme un poison lent chez les lepénistes. Lesquels veulent se convaincre que le rendez-vous champêtre dans le Loiret de lundi agira comme la première dose de l'antidote.