Quinze ans après son plus grand succès, ode manouche à la liberté, l'artiste de 45 ans, ancienne chanteuse de rue aux 5 millions d'albums et 2 milliards de streams, revient réconciliée.

Celle que le public international compare à Edith Piaf, également coach dans l'émission "The Voice", s'est confiée à l'AFP deux mois avant la sortie de cet opus, auquel ont contribué Vianney, Raphaël et Noé Preszow. 

QUESTION: Après avoir quitté Warner, vous sortez pour la première fois un disque chez Tôt ou Tard, label indépendant parisien. Dans quel état d'esprit l'avez-vous conçu ?

R: "L'idée principale c'était de kiffer. Ça a toujours été compliqué de faire des albums parce que je suis perfectionniste. Je me mets des pressions énormes. Ça se voyait pas, mais parce qu'aussi je picolais pas mal et je fumais, j'avais plein de béquilles partout. J'étais jamais satisfaite et en plus j'avais peur de me tromper, de faire les mauvais choix."

Q: Le point de bascule, c'est le premier confinement lié à la crise sanitaire...

R: "J'ai chopé le Covid, j'ai fait un jeûne de trois jours donc j'ai arrêté de boire, de fumer, ça a eu un grand impact. J'avais l'alcool festif mais souvent j'allais dans le mur. En arrêtant tout ça, je me suis respectée, je me suis reconnue, je me suis valorisée."

Q: L'album s'ouvre sur "Je pardonne". A qui, à quoi pardonnez-vous ?

R: "J'ai eu une histoire compliquée dans l'enfance, j'ai été en foyer, je me suis fait virer de collège. Tout était construit sur des bases très bancales et très destructrices. 

A l'adolescence j'ai explosé, à 20 ans j'ai commencé à étudier. Je mangeais des livres ! J'étais avide de comprendre, de connaître."

Q: S'exprimer sur ces failles, est-ce du courage ?

R: "Il faut que ce soit un peu digéré, surtout dans une époque comme la nôtre avec tous les réseaux sociaux. Avant j'étais désincarnée. Je suis passée de la théorie à la pratique et c'est un chemin. On est bourré de paradoxes." 

Q: Par exemple ?

R: "Quand j'ai été connue, j'avais ma gueule sur TF1, les gens me disaient tu peux pas chanter cette chanson ("Je veux", avec les paroles "C'n'est pas votre argent qui f'ra mon bonheur", NDLR) et gagner plein d'argent. J'ai pas dit que je ne voulais pas d'argent, j'ai dit que c'était pas mon moteur."

Q: Alors quoi ?

R: "J'ai créé je ne sais pas combien de projets pour aider (notamment via son association Zazimut, NDLR), j'ai mis mon pognon, pour moi c'était logique, il fallait donner. Mais je savais pas mettre des limites, comme dans ma vie tout court. J'ai toujours été dans un excès, je suis intense et absolue. Je me rendais compte que je voulais être un super-héros et que ça marchait pas. Je m'épuisais."

Q: Cet album à fleur de peau renferme aussi de la douceur, de la bienveillance...

R: "La base c'est de réapprendre à s'aimer. Je ne suis pas dans un monde de Bisounours du tout, mais c'est presque un choix politique d'être dans la joie. Parce que c'est tellement facile de sombrer. Je suis très consciente du monde dans lequel on est, en plus je suis très sensible donc ça me défonce la gueule. En même temps, il faut le choisir ce monde: si tu sombres dans l'angoisse et dans la peur, tu ne vas pas l'aider."

Q: Saine et sauve, est-ce un peu vous ?

R: "C'est complètement moi ! C'est de dire que, malgré le monde dans lequel on vit, il faut s'entourer des bonnes personnes, prendre soin de soi. C'est pas égoïste. Parce que si on veut aider le monde, on a tout intérêt à vraiment aller bien."