Cette décision fait suite à la diffusion d'un documentaire de Netflix sur le chanteur de Noir Désir condamné pour le meurtre en 2003 de Marie Trintignant, précise jeudi dans un communiqué le procureur de la République de Bordeaux, Renaud Gaudeul, confirmant une information de la radio RTL.
Ce film en trois épisodes, intitulé "Le cas Cantat" et diffusé au printemps, contient "plusieurs affirmations et témoignages ne figurant pas" dans les quatre procédures déjà ouvertes sur les circonstances de la mort de Mme Rady, toutes classées sans suite, ajoute le magistrat.
Outre le dossier en recherches des causes de la mort ouvert après son décès au domicile conjugal à Bordeaux, "trois autres procédures subséquentes" avaient été ouvertes en 2013, 2014 puis 2018, rappelle-t-il.
- Passage aux urgences -
Les deux dernières avaient été ouvertes à la suite de plaintes de la présidente de l'association Femme et libre, Yael Mellul, ancienne avocate du dernier compagnon de Krisztina Rady.
Jointe par l'AFP, elle s'est dit "très soulagée" du "changement radical de position du parquet de Bordeaux" sur ce qu'elle qualifie "d'affaire de suicide forcé".
Selon elle, le témoignage anonyme d'un infirmier dans le documentaire Netflix est un "élément nouveau" qui "corrobore le fait que Krisztina Rady était victime de violence conjugale".
Dans "Le cas Cantat", cet infirmier affirme qu'elle était passée aux urgences "suite à une altercation avec son compagnon, une violente dispute" avec "décollement du cuir chevelu et des bleus, des hématomes", survenue "après Vilnius, quand Bertrand Cantat est retourné s'installer dans leur domicile familial".
Cela "signifie très probablement que Krisztina Rady a été très violemment attrapée par les cheveux ou traînée par les cheveux", avait ajouté cet infirmier, qui avait consulté par "curiosité" son dossier aux archives d'un hôpital de la région bordelaise où il était intérimaire.
En 2013, dans un livre-enquête, "Bertrand Cantat Marie Trintignant: L'amour à mort", deux journalistes, Stéphane Bouchet et Frédéric Vézard, évoquaient un message de détresse laissé par Krisztina Rady sur le répondeur de ses parents. Elle y évoquait "l'enfer" que lui faisait vivre le père de ses enfants, "ce cauchemar que Bertrand appelle l'amour".
Mme Mellul assure avoir elle aussi "de nouveaux témoignages à transmettre au parquet de Bordeaux", sans en préciser la nature.
- Polémiques et annulations -
Née le 23 août 1968, Krisztina Rady, interprète de formation, femme de lettres, de théâtre et traductrice, avait rencontré Bertrand Cantat en 1993, lors d'un festival à Budapest.
Marié en 1997, le couple a eu deux enfants et n'a jamais divorcé même s'il s'est séparé peu après la naissance de leur fille, le chanteur ayant fait la connaissance de l'actrice Marie Trintignant.
Condamné à huit ans de prison en Lituanie pour des coups mortels en 2003 à Vilnius sur Marie Trintignant, le chanteur avait été rapidement mis hors de cause dans le suicide de Mme Rady.
Icône rock française, le chanteur bordelais libéré en 2007 a progressivement repris son activité publique à partir de 2010, avec un album et une tournée avec le groupe Detroit, suivis de la sortie, en décembre 2017, de son premier album solo "Amor Fati".
La promotion de cet album a suscité une polémique, tout comme la tournée dans la foulée, émaillée de concerts annulés et de manifestations d'associations féministes.
Le 11 juin 2018, le chanteur, accueilli aux cris "d'assassin" à Grenoble en mars, a supprimé ses dernières dates prévues.
En 2020, il a encore annulé un spectacle coécrit avec le romancier Caryl Férey et fin 2021, des militantes féministes ont tenté de bloquer l'accès au théâtre de la Colline, à Paris, où se tenait la première de la pièce "Mère", créée et mise en scène par Wajdi Mouawad sur une musique de Bertrand Cantat.
Le chanteur a publié en décembre dernier un deuxième album avec Detroit.