Des mesures d'urgences et une méthode de travail pour sortir la tête de l'eau. Pour son premier déplacement à un congrès d'élus depuis sa nomination, l'ancien président du conseil général de Savoie s'est employé à apaiser le courroux des élus des départements réunis en congrès à Angers.

Dans la matinée, les discours ont porté sur une unique revendication: "Ne nous asphyxiez pas".

Les départements font face à une explosion de leurs dépenses sociales, par nature contracycliques, en matière de protection de l'enfance, d'aide aux personnes âgées dépendantes ou porteuses de handicap. Mais ils voient dans le même temps fondre leurs recettes tirées notamment des transactions immobilières, en pleine crise du secteur.

Dans ce contexte déjà dégradé, le texte initial du budget 2025 prévoit de les faire participer au même titre que les autres collectivités pour redresser les comptes publics. 

Or selon l'association Départements de France, les départements seraient la strate de collectivités "la plus impactée", avec une contribution à hauteur de 44% de l'effort de 5 milliards d'euros demandé aux élus locaux.

Ces économies font partie de l'effort budgétaire de 60 milliards d'euros dans le projet de budget, actuellement en débat au Parlement et sur lequel le Premier ministre reconnaît qu'il devra "probablement" recourir à l'article 49-3.

Très attendu, Michel Barnier a partiellement rassuré ses interlocuteurs, en répondant notamment à leur demande "d'arrêter de charger la barque" en matière de nouvelles dépenses "imposées par en haut".

"Je suis là pour vous dire que, tenant compte de votre situation très spécifique, nous allons réduire très significativement l'effort qui vous est demandé par le projet de loi de finances", a déclaré le chef du gouvernement, dressant le constat d'un "modèle départemental" arrivé "à ses limites".

Il n'a toutefois pas avancé de chiffres sur la baisse de cette contribution, qui "dépendra de la discussion au Sénat", a précisé Matignon.

- 200 millions -

Pour répondre à l'urgence, Michel Barnier a présenté cinq premières mesures. Outre la réduction de la contribution au fonds de réserve, il a accédé à la demande de relèvement de 0,5 point pour trois ans du plafond des droits de mutation à titre onéreux, prélevés sur les transactions immobilières, qui devrait rapporter un milliard d'euros.

Il a également promis de revenir "a minima" sur le caractère rétroactif de la baisse du taux du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, une aide à l'investissement.

Sur l'autonomie et le handicap, une enveloppe de 200 millions d'euros sera débloquée pour 2025. Enfin, la hausse des cotisations à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales sera étalée sur quatre ans au lieu de trois.

Michel Barnier a également tenu à rassurer les départements, en plein questionnement existentiel sur leur avenir, alors qu'ils étaient encore menacés de disparition il y a un an au nom de la simplification du millefeuille territorial.

Début 2025, une "instance de pilotage partagée entre l'Etat et les départements" sera chargée notamment de réfléchir à la mise en place d'une "allocation sociale unique".

"Les départements sont et resteront les acteurs des politiques de solidarité humaine et territoriale", a promis le Premier ministre.

Il a par ailleurs plaidé pour une "contractualisation pluriannuelle qui anticipera et limitera l’évolution des dépenses des départements" et s'est dit également ouvert à un retour du cumul des mandats.

"Je suis plutôt satisfait et vigilant", a réagi François Sauvadet, président UDI (centre) de Départements de France, se félicitant de voir enfin reconnu "le rôle essentiel des départements pour la cohésion sociale et territoriale".

Il a toutefois prévenu que "la seule solidarité départementale ne pourra pas répondre aux enjeux de société devant lesquels sont placés les départements, dont le vieillissement de la population".

"Nous sommes très très loin du compte et c'est loin d'être suffisant pour nous permettre de monter correctement nos budgets 2025", a regretté Jean-Luc Gleyze, président PS du groupe des départements dirigés par la gauche.

A droite, le LR Nicolas Lacroix s'est montré plus conciliant. "On est rassurés, mais on attend maintenant plus précisément quel sera le juste effort demandé au départements".