François Hollande tient, à 8 heures ce matin, une réunion d'urgence sur le dossier Alstom. Au menu : l'entrée officielle, hier, d'un troisième acteur au chevet de l'équipementier français. Le japonais Mitsubishi Heavy Industries (MHI) travaille désormais avec l'allemand Siemens « pour étudier une possible offre conjointe pour certains actifs du conglomérat français », ont indiqué les deux groupes, confirmant des informations de Bloomberg.Le PDG de MHI a précisé « avoir été invité par Siemens à se joindre à lui ». « Le Japon a les mêmes problèmes que nous autres européens en ce qui concerne l'accès aux sources d'énergie. C'est pourquoi nous avons voulu impliquer notre partenaire japonais pour voir comment il est possible d'aller ensemble de l'avant dans les activités produisant des composants destinés à produire et utiliser l'énergie, indique-t-on de source proche du conseil de surveillance de Siemens, à Munich. Ce sont des activités dont nous ne devons pas perdre le contrôle. » Comme Siemens s'y est engagé, l'offre commune devra être présentée au plus tard lundi, soit une semaine avant l'expiration de celle de General Electric (GE), que le conseil d'administration d'Alstom étudie depuis plus d'un mois. Hier après-midi, MHI et Siemens n'avaient en revanche pas encore pris contact avec le comité d'administrateurs indépendants d'Alstom chargé d'examiner les offres, au grand agacement de celui-ci.

« Alliance entre égaux »

L'offre conjointe de Siemens et MHI, discutée le week-end dernier avec le ministre de l'Economie Arnaud Montebourg, est assez différente de celle de GE. « A ce stade, c'est davantage une offre MHI avec un appui de Siemens », indique une source proche du dossier. Selon Bloomberg, MHI serait intéressé par les turbines vapeur d'Alstom ainsi que par ses activités dans les réseaux de transport d'électricité (« Grid »). Siemens serait intéressé de son côté par les turbines à gaz et propose toujours d'apporter à Alstom une grande part de son activité dans le transport pour renforcer l'équipementier français. Reste à connaître le sort de l'hydraulique et de l'éolien.Surtout, « la proposition de MHI est conçue comme un maintien d'Alstom. Le groupe joue l'alliance entre égaux », poursuit cette source proche du dossier. Ce qui pourrait impliquer, comme le demandait le gouvernement à GE, une approche « partenariale » via des sociétés communes et non un simple rachat. L'argument de l'exécutif de constituer un champion européen serait moins tangible, mais « un groupe japonais qui propose un partenariat, ce n'est pas la même chose qu'un américain qui propose un rachat », note une source gouvernementale. Alors que le l'exécutif, fort de son décret étendu sur les secteurs stratégiques, négocie avec GE les moyens d'assurer la « souveraineté » française sur les équipements nucléaires, MHI a l'avantage d'être un partenaire d'Areva, avec qui il conçoit un réacteur dans la coentreprise Atmea. L'alliance avec MHI permettrait aussi, selon l'entourage de Siemens, « d'enlever une épine juridique sur l'aspect des autorités de concurrence ».Il n'est toutefois pas certain que l'option Siemens-MHI ait les faveurs du conseil d'administration et des actionnaires d'Alstom, alors que GE met 12,35 milliards d'euros sur la table. L'offre comportera toutefois une partie en « cash », indique une source proche du dossier. Mais le partage entre Siemens et MHI suscite déjà, dans l'entourage d'Alstom, des critiques autour du risque de « démantèlement ».