Un préambule, deux chapitres sur les différentes parties de carrière, garnis de sous-chapitres faits de rappels, d'invocations et de quelques pistes plus concrètes, le tout sans aucune mention du compte épargne-temps universel (Cetu) : envoyé mercredi en fin d'après-midi par le Medef, l'avant-projet patronal pour la négociation sur les parcours professionnels risque de ne pas soulever l'enthousiasme des syndicats. Même s'il s'agit d'une première ébauche qui va vraiment lancer la négociation lors de la séance de ce jeudi.Le texte, auquel « Les Echos » ont eu accès, ne reprend pas l'intitulé du document d'orientation - « Pour un nouveau pacte de la vie au travail » envoyé par le gouvernement Borne. Il lui préfère celui d'« avant-projet d'accord national interprofessionnel en faveur de l'anticipation et de l'accompagnement des transformations de l'emploi ».

Cette anticipation, estime le patronat, passe d'abord par la « réaffirmation » du rôle des branches professionnelles et des territoires, par un « rappel » de l'importance des GEPPMM (Gestion des emplois, des parcours professionnels et de la mixité des métiers) dans les entreprises, par l'organisation de rendez-vous « à des moments clés » de la vie professionnelle, mais aussi par de la formation. Un sous-chapitre concerne une refonte des dispositifs de reconversions, un autre l'usure professionnelle, via un rappel des dispositions du dernier accord interprofessionnel notamment.

Pour la fin de carrière, le patronat souligne « l'enjeu sociétal de changement de perception des compétences des actifs seniors », le risque pour les intéressés de tomber dans le chômage de longue durée, et des transitions avec la retraite trop marquée du sceau de « l'inaptitude ». Sa solution ? « Encourager » le dialogue social à s'emparer du sujet, « mobiliser l'ensemble des acteurs autour d'une grande cause nationale sur les seniors », ou encore « favoriser l'évolution des pratiques managériales ».

« Ça sent de plus en plus le sapin »

Un peu plus concrètement, l'avant-projet propose des mécanismes incitatifs à l'embauche, comme un CDI senior, une révision des conditions d'indemnisation chômage, plus de visibilité donnée à l'employeur sur la date de départ à la retraite de ses salariés, ou la mise en place d'un temps partiel de fin de carrière défendu par Bruno Le Maire. Le patronat propose enfin d'améliorer les dispositifs de retraite progressive et de cumul emploi-retraite, sans dévoiler comment.

« Ça sent de plus en plus le sapin », a réagi à chaud le négociateur CFE-CGC, Jean-François Foucard. Outre les nombreux « rappels », l'avant-projet commence par évoquer les jeunes sans emploi ni formation, et « n'est pas de nature à faire bouger les lignes ». « Le patronat ne se fait pas trop mal. Quelle plus-value ? Pour qui ? A quel horizon ? On se demande ou est le grand paradigme mis en avant par le patronat », a-t-il ajouté.La CFDT risque d'accuser le coup, elle qui a mis la barre haut en termes d'exigences avec cette négociation. Lors d'une conférence de presse tenue au siège de l'organisation mercredi matin, avant l'envoi du texte patronal donc, son numéro deux, Yvan Ricordeau, a été clair. Emploi des seniors, reconversions professionnelles, usure au travail, Cetu : « L'objectif pour nous, c'est d'être au rendez-vous d'un accord ambitieux sur les quatre blocs qui nous sont proposés », a-t-il déclaré.Pas question en particulier de lâcher le Cetu - une revendication de longue date de la centrale et une promesse de campagne d'Emmanuel Macron, qui plus est - quand bien même un compromis acceptable serait trouvé sur les trois autres thèmes. L'absence dans le document du Medef de mention de ce dispositif permettant d'épargner des jours de congé pour aménager sa carrière, voire anticiper sa retraite, n'est pas une surprise, le Medef et la CPME n'en voulant pas. Si la séance de négociation de ce jeudi ne permet pas de faire bouger les lignes, la CFDT suspendra la négociation. A charge pour son bureau national la semaine prochaine de décider de la suite.