Interrogé par la presse dans sa résidence de Mar-a-Lago en Floride sur une éventuelle rencontre avec Vladimir Poutine avant la fin du mois, le président américain a répondu: "probablement".

En appelant le président russe au téléphone la semaine passée pour envisager de régler directement avec lui une fin du conflit, Donald Trump a provoqué un choc en Europe et en Ukraine, le président Volodymyr Zelensky dénonçant mardi des pourparlers "sur l'Ukraine sans l'Ukraine", depuis Ankara, après une rencontre avec le président turc Recep Tayyip Erdogan.

"Je suis très déçu" de ces propos, a répondu Donald Trump. "J'entends qu'ils sont fâchés de ne pas avoir de siège (à la table des négociations), alors qu'ils ont eu un siège pendant trois ans, et même bien avant cela", a encore déclaré le républicain.

"Je pense que j'ai le pouvoir de mettre fin à la guerre", a-t-il estimé.

Interrogé sur le sujet, M. Trump a jugé souhaitable la tenue d'élections en Ukraine, actuellement impossibles en raison de la loi martiale. "Nous avons une situation où nous n'avons pas eu d'élections en Ukraine, où nous avons une loi martiale essentiellement", a-t-il relevé, pointant une érosion de la popularité de M. Zelensky, dont la légitimité est mise en doute par le Kremlin.

A Ryad, le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio, à l'issue des premiers pourparlers de ce niveau entre Russes et Américains depuis l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, s'est dit "convaincu" que la Russie voulait s'engager dans un "processus sérieux" pour mettre fin à la guerre. 

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a estimé que les Américains avaient commencé à "mieux comprendre" la position de Moscou.

Mais la cheffe de la diplomatie de l'Union européenne, Kaja Kallas, a appelé mardi soir les Etats-Unis à "ne pas tomber dans les pièges russes", estimant que Moscou allait tenter de diviser les Occidentaux.

- Zelensky reporte son voyage -

Mais, a insisté Volodymyr Zelensky à Ankara, "l'Ukraine, l'Europe au sens large -- cela inclut l'Union européenne, la Turquie et le Royaume-Uni -- devraient participer aux discussions et à l'élaboration des garanties de sécurité nécessaires avec l'Amérique concernant le sort de notre partie du monde".

Le dirigeant ukrainien a également annoncé reporter au 10 mars le voyage qu'il devait effectuer ce mercredi en Arabie saoudite.

Washington et Moscou ont dit que Kiev participerait aux pourparlers "en temps voulu".

A Kharkiv, en Ukraine, des habitants ont dit leur colère: ces discussions sont "une sorte de trahison", a déclaré Iryna Panova, une comptable de 50 ans, dans un square enneigé de la deuxième ville ukrainienne, souvent frappée par l'armée russe. "C'est notre guerre, avec les Russes. Sans nous, ça ne peut pas être résolu", a-t-elle insisté.

Les Européens, dont les principaux dirigeants se sont réunis en urgence lundi à Paris, réclament de pouvoir "faire équipe" avec les Etats-Unis pour une paix "juste et durable" en Ukraine, a déclaré la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen sur X, après une rencontre avec l'envoyé spécial du président Donald Trump sur l'Ukraine, Keith Kellogg.

Mais Marco Rubio et Sergueï Lavrov, à Ryad, ont ignoré ces questions.

- "Niet" à un contingent européen -

Le président américain, interrogé par la presse, s'est également déclaré "totalement favorable" à la présence en Ukraine de troupes européennes de maintien de la paix, un sujet qui divise les Européens.

Une idée à laquelle la Russie est fermement opposée.

"Nous avons expliqué aujourd'hui que le déploiement (en Ukraine) de troupes des forces armées des pays de l'Otan, mais sous un autre drapeau, sous le drapeau de l'Union européenne ou sous des drapeaux nationaux ne change rien. C'est bien sûr inacceptable", a déclaré Sergueï Lavrov, alors que certains pays européens et Kiev avancent l'hypothèse de telles forces en territoire ukrainien pour garantir la sécurité de l'Ukraine et le respect d'un futur accord mettant fin à la guerre.

Dans un entretien à des journaux français, le président Emmanuel Macron a pour sa part assuré que "la France ne s'apprête pas à envoyer des troupes au sol, belligérantes dans un conflit, sur le front" en Ukraine. 

Il a annoncé qu'il organiserait mercredi une nouvelle réunion "avec plusieurs Etats européens et non-européens" sur l'Ukraine. 

Le président Trump "peut réamorcer un dialogue utile" avec le président Poutine, a par ailleurs estimé le chef de l'Etat français. "Il recrée de l'ambiguïté stratégique pour le président Poutine" en employant "des mots très fermes" et en créant "de l'incertitude" qui "peut aider à faire pression".

Avant le début des pourparlers à Ryad, la Russie avait notamment souligné que le règlement de la guerre en Ukraine était indissociable de la réorganisation de l'architecture sécuritaire européenne.

La Russie réclame de longue date un retrait des forces de l'Otan d'Europe orientale, car elle considère l'Alliance comme une menace existentielle. Elle avait notamment utilisé cet argument pour justifier son invasion de l'Ukraine en 2022.

L'administration du président Donald Trump s'est montrée, elle, très critique de ses alliés européens et moins disposée à soutenir l'Ukraine.

La rencontre de mardi intervenait après la conversation téléphonique la semaine dernière entre Donald Trump et Vladimir Poutine, qui a fait voler en éclats l'union occidentale et la stratégie d'isolement visant le président russe.