Près de trois ans après l'éclosion du scandale, les deux juges d'instruction saisis de ce dossier ont rendu leurs conclusions, a annoncé à l'AFP le procureur de Lyon Thierry Dran.

Ils ordonnent le renvoi de Gaël Perdriau devant le tribunal correctionnel pour "chantage, soustraction, détournement de fonds publics par un dépositaire de l'autorité publique et participation à une association de malfaiteurs", un délit puni d'au moins cinq ans de prison, a-t-il précisé dans un communiqué.

Sous réserve de recours, le procès se tiendra entre le 22 et le 26 septembre, a ajouté le procureur.

L'affaire porte sur une vidéo montrant l'ancien Premier adjoint centriste Gilles Artigues, un rival potentiel du maire, en train de se faire masser par un escort-boy dans une chambre d'hôtel à Paris en janvier 2015.

Gaël Perdriau, 52 ans, est soupçonné d'avoir exigé "la loyauté politique" de Gilles Artigues, "des arbitrages électoraux et son absence d'opposition aux décisions du maire" contre la non divulgation de ce film, selon un document judiciaire consulté par l'AFP. 

Exclu du parti Les Républicains et vilipendé par ses opposants, le maire a toujours clamé son innocence et refusé de démissionner, même s'il s'est mis en retrait de ses fonctions à la métropole. Il n'a pas non plus exclu de se représenter aux élections municipales de 2026.

Contacté par l'AFP vendredi, il n'a pas souhaité s'exprimer et ses avocats n'étaient pas immédiatement disponibles.

- Sept co-prévenus -

Les magistrats instructeurs demandent que le maire soit jugé avec trois anciens proches, accusés d'avoir organisé le tournage de la sextape: son ex-directeur de cabinet, Pierre Gauttieri, son ancien adjoint à l'Éducation, Samy Kefi-Jérôme, et l'ex-compagnon de ce dernier, Gilles Rossary-Lenglet, qui avait révélé l'affaire à Mediapart en 2022.

Contrairement aux réquisitions du parquet, les juges ordonnent également le renvoi de deux couples à la tête d'associations stéphanoises soupçonnées d'avoir servi à rémunérer les auteurs de la sextape en échange de prestations fictives financées par la mairie. Ils seront jugés pour "abus de confiance".

"Je suis satisfait que le procès ait lieu en 2025 (...) et que tous les protagonistes, y compris les représentants des associations, soient renvoyés devant un tribunal", a déclaré à l'AFP Gilles Rossary-Lenglet. "Même si je sais que je vais être condamné, je suis heureux car la vérité va gagner à la fin", a ajouté celui qui se présente comme un "lanceur d'alerte".

L'enquête comporte un second volet: lors de l'instruction, M. Rossary-Lenglet a fourni une vidéo de juin 2015 dans laquelle est évoqué un projet de chantage contre l'ancien maire de Saint-Etienne Michel Thiollière (UMP-rad, de 1994 à 2008). L'idée, selon lui, était de piéger l'ancien édile avec une prostituée mineure. Mais le plan a été abandonné.

- "Bonne nouvelle" -

Selon Me André Buffard qui représente les deux victimes, l'annonce d'un procès constitue "un soulagement" pour Gilles Artigues qui est désormais directeur diocésain de l'enseignement catholique du Tarn. Quant à Michel Thiollière, il est "heureux d'apprendre que les faits le concernant (...) seront eux-aussi jugés", a ajouté l'avocat.

Les élus stéphanois, de droite comme de gauche, ont également salué la tenue d'un procès en septembre.  

"C'est une très bonne chose que la justice se prononce avant le démarrage de la campagne municipale, qui pourra se dérouler sur des bases plus claires", a ainsi déclaré Nicole Peycelon, une élue LR qui a fait défection de la majorité.

Les élections auront lieu "dans un climat plus serein, car les Stéphanois sauront à quoi s'en tenir", a renchéri l'écologiste Olivier Longeon.

C'est une "bonne nouvelle pour Saint-Etienne", "M. Perdriau ne pourra plus se draper derrière la seule présomption d'innocence pour continuer de nuire aux intérêts de notre territoire et de ses habitants", a ajouté l'opposition socialiste dans un communiqué.