Comme un air de déjà-vu. Au plus fort de la crise financière de 2009, les banquiers devaient rendre compte au gouvernement de l'octroi de crédit aux entreprises. Le « credit crunch » redouté n'a pas eu lieu, mais, sur le plan politique, la vigilance est de retour. Le nouveau ministre de l'Economie, Arnaud Montebourg, a demandé lundi soir à une poignée de dirigeants de banque, dont Jean-Laurent Bonnafé, le patron de BNP Paribas et président de la Fédération bancaire française (FBF), de travailler à des engagements en matière de crédit aux PME qui pourraient entrer en compte dans le calcul du variable des banquiers. Le locataire de Bercy s'est voulu le porte-voix des PME, répercutant « l'insatisfaction exprimée par de nombreuses entreprises qui témoignent d'un accès beaucoup trop difficile au crédit ». De fait, les banques ne sont pas seules à sélectionner leurs clients : les PME aussi choisissent les établissements avec lesquels elles veulent travailler et n'hésitent pas à en abandonner certains. Selon une étude de place commandée par plusieurs banques auprès d'un grand institut de sondage, environ une entreprise sur six (17 %) a claqué la porte à la suite du choix de la banque de ne pas lui accorder un crédit. Ce sujet n'est pas le seul motif de départ : la tarification intervient dans un cas sur quatre. Les clients se plaignent aussi de la qualité de la relation, reprochant pêle-mêle au conseiller son manque de compétences ou d'être inattentif. Faible consolation, dans un cas sur trois, ces fermetures ne sont pas le signe d'une insatisfaction : le client s'en va à la fin d'une opération financière, ou simplement parce qu'il a décidé de limiter le nombre de banques avec qui il travaille.

Concurrence aiguisée

Au total, 14 % des entreprises ont abandonné leur banque en 2013. Dans ces conditions, limiter l'hémorragie reste un enjeu stratégique. D'autant que la concurrence est devenue vive depuis la crise financière : les entreprises sont de plus en plus « multibancarisées » et cherchent à ne pas dépendre d'un seul établissement qui pourrait avoir à réduire ses expositions. Autre facteur, la faiblesse des taux de crédit joue un rôle d'aiguillon et de produit d'appel. « Le développement du crédit aux PME et TPE est au coeur des stratégies de chacune des banques françaises », a souligné Jean-Laurent Bonnafé, au lendemain de la rencontre à Bercy. Mais les banques ont pour le moment du mal à identifier des dossiers suffisamment solvables à financer. Ceux qui leur parviennent sont moins nombreux et de moins bonne qualité. Du coup, au-delà de l'appel à prêter davantage, le « capitaine » Montebourg y va de ses idées de développement : les banques pourraient s'inspirer des « fonds de retournement » ou encore participer activement au plan gouvernemental Usine du futur, programme de reconquête industrielle lancé à l'automne 2013 (« Les Echos » du 12 septembre).