Le ministre de l'Industrie, Marc Ferracci (Renaissance), a rappelé ce week-end que le décret serait publié "avant la fin de l'été", et par conséquent avant la fin de la navette parlementaire du texte du sénateur Daniel Grémillet (LR), afin de permettre à certaines filières de "lancer des investissements". 

Un calendrier contesté par les députés, y compris ceux de la coalition gouvernementale : "Je ne crois pas (...) qu'il soit sage de se dire +on verra plus tard, prenons d'abord un décret alors que le Parlement est en train de discuter+", a lancé le rapporteur du texte et ancien ministre de l'Economie Antoine Armand (Renaissance).

Et le député de Haute-Savoie de suggérer au gouvernement de "surseoir de quelques semaines encore à l'adoption d'un décret".

La présidente de la commission des Affaires économiques, Aurélie Trouvé (LFI), s'est elle "étonnée" des propos du ministre, les jugeant "fort peu respectueux" de la "démocratie parlementaire".

Elle a rappelé que la loi énergie climat de 2019 fixait le "principe d'une loi quinquennale sur l'énergie" à partir de 2023, et que le choix du gouvernement d'en passer par une simple proposition de loi conduisait à ce qu'il n'y ait "ni étude d'impact ni avis du Conseil d'Etat, ce qui peut quand même sembler absolument indispensable".

Au nom du Rassemblement national, le député de la Meuse Maxime Amblard s'est félicité d'une "victoire, celle d'avoir obtenu grâce à Marine Le Pen (...) l'ouverture de ce débat indispensable".

C'est en effet sous la pression du RN, qui en avait fait un motif de censure, que François Bayrou a accepté d'inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée ce texte.

- Éolien et solaire exclus -

Sur le fond, le débat, prévu pour l'instant jusqu'à vendredi, portera pour l'essentiel sur la question de la relance du nucléaire, poussée par l'exécutif avec le soutien du Rassemblement national, et combattue par LFI et les écologistes, le PS adoptant une position de compromis.

Face au retard pris dans le développement des énergies renouvelables, le groupe socialiste plaide pour la construction de huit nouveaux EPR d'ici 2035, avec une clause de revoyure en 2030.

Comme le reste de la gauche, le PS déplore que le texte ne fixe plus la part des énergies renouvelables à atteindre, parlant uniquement maintenant d'énergies "décarbonées" - démarche que soutient M. Ferracci au nom d'une nécessaire "flexibilité".

En début de soirée, les députés ont réécrit le premier article de la proposition de loi (PPL), initié par la commission, qui confiait le monopole de la construction et de l'exploitation des réacteurs nucléaires à la puissance publique et à EDF.

Ils ont adopté, grâce au soutien massif du RN et contre l'avis du gouvernement et du rapporteur, un amendement du député Horizons Henri Alfandari qui définit les grands objectifs d'une politique énergétique - supprimant d'un même mouvement ce monopole, finalement rétabli plus tard dans un autre article.

Cette politique énergétique doit notamment "proposer un objectif annuel d'énergie décarbonée qui ne peut être décliné par type d'énergie". 

L'amendement définit ce que sont ces énergies décarbonées: les installations nucléaires, hydrauliques, marémotrices, géothermiques, aérothermiques, biomasse, osmotiques et cinétiques - un sous-amendement du RN ayant supprimé de cette énumération les installations éoliennes et solaires.

Un autre sous-amendement du RN a précisé que la politique énergétique devait fixer un objectif de prix final d'électricité pour les consommateurs. Marine Le Pen s'est félicitée sur X de premières "victoires majeures".

Plus tard dans la soirée, les députés ont approuvé contre l'avis du gouvernement un article visant notamment à refaire d'EDF un établissement public à caractère industriel et commercial, indexant les tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVe) sur les coûts de production du système électrique, et rétablissant les tarifs réglementés du gaz.

Un amendement LFI adopté avec les voix de l'extrême droite a élargi à l'ensemble des consommateurs ces TRVe et un autre des communistes, sous-amendé par LFI et le RN, a inscrit dans le texte le fait de "favoriser la sortie des règles de fixation du prix du marché européen de l'énergie".