Leurs vies reflètent les deux fléaux qui frappent le Honduras: la violence et la pauvreté, des sujets à peine abordés durant la campagne pour les élections présidentielles à un tour de dimanche où aucun favori clair ne se détache.
Une campagne qui a pris une nouvelle tournure depuis le soutien inattendu du président américain Donald Trump au candidat et homme d'affaires de droite, Nasry Asfura. Son soutien s'est accompagné de violentes attaques contre les autres candidats: celle de gauche Rixi Moncada et le présentateur télé Salvador Nasralla.
Pour Yuderlis Moreno, 31 ans, vendeur de rue à Tegucigalpa, la capitale, le soutien de M. Trump à M. Asfura est "une bonne chose". Il espère qu'ainsi, "les gens qui émigrent pourront entrer rapidement (aux États-Unis) et trouver du travail" pour aider leurs familles.
Mais pour l'instant, Trump maintient la frontière fermée et poursuit sa chasse aux migrants illégaux qui a conduit cette année à l'expulsion de près de 30.000 Honduriens et révoqué un statut de protection migratoire pour 51.000 autres.
- Envois de fonds -
Bertha Sierra, 57 ans, craint que son petit-fils Joseph, 21 ans, soit expulsé, bien que détenteur d'un permis de travail.
"Que Dieu fasse qu'ils ne me le renvoient pas", dit Mme Sierra en préparant du riz dans sa modeste maison du quartier Cantarero, sur une colline à Tegucigalpa, où beaucoup survivent grâce aux envois de leurs proches aux États-Unis qui représentent presque un tiers du PIB du pays.
En cas de retour forcé, elle estime qu'il sera "difficile" pour son petit-fils de trouver du travail au Honduras, où 60% des 11 millions d'habitants vivent dans la pauvreté.
Erick Baca, étudiant de 20 ans, se réjouit d'avoir "Trump de notre côté". Un soutien à Nasry Asfura qui selon lui "serait bénéfique pour que les Honduriens obtiennent des visas" américains.
Liduvina Maldonado, retraitée de 61 ans, peste au contraire que Donald Trump "s'en mêle". "Nous on ne se mêle de rien (aux États-Unis), et je vais voter pour Rixi", assure-t-elle.
Dans le quartier voisin aux ruelles escarpées du 14 de Enero, traversé par un égout en plein air et où errent chiens et poules, Presentacion Núñez, 70 ans, construit une maison au bord d'une petite falaise.
Son fils David travaille depuis 20 ans sans papiers en Californie et lui envoie 100 dollars par mois. "Ici, on ne fait que survivre", déplore ce maçon atteint de diabète.
- Bibles contre balles -
Le Honduras, l'un des pays les plus violents d'Amérique latine, est sous la coupe des gangs du Barrio 18 et de la Mara Salvatrucha, que l'administration Trump a déclarés organisations "terroristes".
Membre d'une église évangélique, Eliseo Pineda, 29 ans, ancien du Barrio 18, tatoué sur la poitrine, les bras et le dos, se consacre à réhabiliter les "âmes" des membres repentis. "Mon rôle était celui de tueur à gages, c'était ma vie", raconte-t-il, bible en main, dans le temple du ministère Passion pour les âmes, en périphérie de la capitale.
Dans le temple, il y a d'autres anciens "assassins" qui se sont repentis, ajoute le pasteur Carlos Cerrato, 58 ans, lui aussi revenu du Barrio 18 et fondateur de l'église en 2007 où les membres de la Mara Salvatrucha, ennemis jurés du Barrio 18, sont "les bienvenus", affirme-t-il.
Ce chemin vers la réhabilitation est celui qu'a suivi Erixon Lira, 36 ans, qui a rejoint un gang à l'adolescence et a été emprisonné deux fois.
Avant que le service religieux ne commence, il déplore que le Honduras n'ait pas de programmes de réinsertion pour que les délinquants "puissent redevenir utiles à la société".
Son aspiration ne figure à l'ordre du jour d'aucun des programmes du prochain président.