Mardi, en deuxième lecture, les sénateurs se dirigent vers un vote conforme sur le texte des députés, adopté en deuxième lecture dans l'hémicycle le 3 juin. Cette adoption à l'identique, très probable, permettra une entrée en vigueur rapide, après promulgation par le président de la République.

"C'est un texte qui, pour une fois, en matière pénale, est fait avec les victimes et pour les victimes", défend Eric Pauget (LR) auprès de l'AFP.

"C'est un texte qui a vocation à être une aide à la justice car bien qualifier juridiquement ce qui s'est passé permet d'éviter de banaliser la portée et la gravité des faits. Et c'est un signal envoyé à toute la société pour dire que la route ne peut plus être le défouloir des violences de la société", explique-t-il.

Le débat sur le délit d'homicide et blessures routiers a été relancé après l'accident provoqué par Pierre Palmade en février 2023. Le comédien avait blessé grièvement trois personnes lors d'une violente collision en conduisant sous l'emprise de stupéfiants et a été condamné à cinq ans de prison dont deux ferme en novembre 2024 "pour blessures involontaires".

Depuis trois ans, c'est aussi le combat du chef étoilé Yannick Alléno et son association Antoine Alléno, du nom de son fils mort en mai 2022 après avoir été percuté par un conducteur multipliant les infractions graves, qui a été condamné à 7 ans de prison pour "homicide involontaire".

- "Changement sémantique" -

"Les victimes et co-victimes annuelles de la violence routière n'acceptent plus que les auteurs des collisions qui ont détruit leur vie ne soient poursuivis que pour homicide involontaire. L'homicide routier propose un changement sémantique, souhaité par les victimes, mais intègre aussi des circonstances aggravantes plus nombreuses", argue la Ligue contre la violence routière, qui réclame aussi depuis quelques années l'homicide routier.

Avec ce délit, les responsables d'accidents mortels de la circulation accompagnés d'au moins une circonstance aggravante seront poursuivis pour homicide routier.

Les circonstances aggravantes sont la violation d'une mesure de sécurité, l'état d'ivresse, la consommation de stupéfiants et/ou des substances psychoactives, ne pas être titulaire du permis, un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 30 km/h, le délit de fuite, se servir de son téléphone portable à la main (ou avec des écouteurs), le refus d'obtempérer, le rodéo urbain.

Lorsqu'un conducteur se rendra coupable d'une de ces circonstances, il sera passible de 7 ans de prison et 100.000 euros d'amende, une peine élevée à 10 ans d'emprisonnement et 150.000 euros au delà de deux circonstances aggravantes.

- Quantum inchangé -

Ce sont les mêmes peines que celles appliquées actuellement avec l'homicide involontaire.

Un point qui inquiète, alors que certains observateurs estiment que la moyenne des peines prononcées actuellement est de 2 ans.

"Je redoute l'idée que les magistrats ne dépassent pas leur analyse de l'accident de la circulation comme demeurant un accident. Ils auraient pu le faire si on avait changé le quantum des peines", souligne à l'AFP Maître Vincent Julé-Parade, spécialisé dans la défense des victimes de la route, qui craint "que cette adoption d'homicide routier quelque part ne se limite qu'à un changement sémantique".

Selon lui, "au fond le vrai problème, c'est quel regard les magistrats portent sur le quantum. J'espère me tromper mais j'avoue avoir encore un peu de doutes". 

En 2024, 3.190 personnes sont décédées sur les routes de France métropolitaine et 233.000 ont été blessées, dont près de 16.000 gravement. Selon l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR), les deux tiers des accidents corporels présentent au moins un facteur aggravant et les trois quarts des responsables récidivent, presque aussi fréquemment et plus gravement qu'avant.