« L'obsession du Medef, c'est la création d'emplois. » C'est par ces mots que le président de l'organisation patronale, Pierre Gattaz, a commencé sa conférence de presse mensuelle hier. Pour y parvenir, il ne faut écarter aucune piste, a estimé le patron des patrons. Interrogé par des journalistes sur le niveau du SMIC en France, Pierre Gattaz a répondu qu'une dérogation transitoire au niveau du SMIC s'envisagerait pour « des publics éloignés de l'emploi », a-t-il précisé. Une des solutions consisterait à « avoir temporairement un système permettant la première année, pour un jeune ou quelqu'un qui ne trouve pas de travail, de rentrer dans l'entreprise de façon transitoire avec un salaire adapté qui ne serait pas forcément le salaire du SMIC ». Il a pris l'exemple de personnes sans domicile fixe ou marginalisées, dont la situation ne leur permet pas d'accéder à un travail. « Il vaut mieux quelqu'un qui travaille dans une entreprise avec un salaire un peu moins élevé que le SMIC, de façon temporaire et transitoire, plutôt que de le laisser au chômage », a-t-il argumenté.

Le feu aux poudres

Cette déclaration a mis le feu aux poudres côté partenaires sociaux. Force ouvrière a réagi dans un communiqué en affirmant que Pierre Gattaz « entend ressusciter un SMIC jeunes. Une telle proposition est indécente et sera combattue par Force ouvrière ». « Certaines jeunes peuvent faire partie des publics très éloignés de l'emploi, mais il n'est pas question de faire un "SMIC jeunes" », a précisé l'entourage de Pierre Gattaz aux « Echos ». La polémique a rebondi avec le tweet, côté patronal cette fois, de Laurence Parisot, ex-présidente du Medef, pour qui « proposer un salaire en dessous du SMIC s'apparente à une logique esclavagiste ». La ministre de la Jeunesse, Najat Vallaud-Belkacem, a pour sa part affirmé que le gouvernement était « fermement opposé » à une mesure du type SMIC jeunes.Si le sujet suscite autant de fébrilité, c'est parce que plusieurs voix se sont élevées ces derniers jours en pointant le niveau trop élevé du SMIC en France. L'ancien directeur général de l'OMC, Pascal Lamy, a ainsi proposait la création de « petits boulots » payés en dessous du SMIC, sur le modèle des « mini-jobs » imaginés en Allemagne par Peter Hartz... même si le nouveau gouvernement outre-Rhin vient de faire marche arrière en instaurant un salaire minimum à 8,5 euros brut de l'heure. Quant au chef de l'Etat, il recevait hier trois économistes, Philippe Aghion, Gilbert Cette et Elie Cohen, qui ont travaillé pour lui pendant la campagne présidentielle et qui estiment que le niveau du SMIC est un frein à l'emploi.Dans un même esprit, Pierre Gattaz a insisté hier sur la nécessité pour les entreprises de pratiquer la modération salariale. « Il ne faudrait pas que l'augmentation des salaires des prochains mois ou des prochaines années englobe complètement la baisse du coût du travail qui a été mise en oeuvre par le pacte de responsabilité. ça c'est le grand danger », a-t-il averti, appelant à « être extrêmement vigilant dans les négociations annuelles obligatoires ».