Tout le week-end, les réunions n'ont cessé de s'enchaîner entre le gouvernement et les députés de la majorité pour arrêter le geste promis par le Premier ministre en faveur des ménages modestes, et en particulier des « petits retraités ». C'est sur ce point particulier que les discussions ont été les plus compliquées pour trouver le bon outil. Trois critères, juridique, technique et budgétaire, entrent en ligne de compte. Le premier est particulièrement sensible car plusieurs mesures décidées par le gouvernement ont été retoquées ces derniers mois par le Conseil constitutionnel. Cette fois-ci, l'exécutif ne veut prendre aucun risque. C'est pourquoi la piste d'un crédit d'impôt, qui avait été envisagée ces derniers jours, a été écartée ce week-end. Le principe de l'égalité devant l'impôt empêche en effet de verser un crédit d'impôt à un retraité qui toucherait par exemple 1.000 euros de pension, alors qu'un salarié avec le même revenu n'aurait droit à rien.Il a aussi été imaginé de verser un chèque sous forme d'aide, comme cela avait déjà été fait lors de la réforme des retraites. En novembre dernier en effet, à quelques heures du vote de la loi par les députés, la ministre des Affaire sociales, Marisol Touraine, avait annoncé le versement d'une aide à l'acquisition d'une complémentaire santé pour les plus de 60 ans (cette aide était de 500 euros par an jusqu'alors et avait été revalorisée de 50 euros grâce à ce geste). La mesure a toutefois deux inconvénients : elle est peu lisible et juridiquement, elle n'est pas sans risque non plus, car il faudrait justifier que cette aide soit réservée aux seuls retraités.Devant de tels inconvénients, l'exécutif pourrait utiliser un troisième levier, celui du gel partiel. Au lieu de geler jusqu'en octobre 2015 l'ensemble des pensions, à l'exception de celles qui sont en dessous du minimum vieillesse, soit 792 euros par mois, le gel serait relevé jusqu'à un niveau qui pourrait aller de 1.000 à 1.200 euros de pension. Le coût pour les finances publiques serait alors de 200 à 300 millions d'euros. « Lâcher 300 millions sur un plan d'économies de 50 milliards, ce n'est pas le bout du monde », estime un conseiller.

Problème de timing

Si ce scénario a les faveurs de l'exécutif, c'est qu'il est juridiquement bordé, mais il est compliqué à mettre en oeuvre. D'ailleurs, ce gel partiel avait été écarté par le gouvernement au moment de la réforme des retraites l'an passé car jugé « techniquement impossible » à l'époque. Cela ne semble plus être le cas aujourd'hui. Le principal souci est d'arriver à déterminer le montant exact des pensions touchées, la plupart des retraités ayant une pension de base et une complémentaire, sans compter les salariés ayant cotisé à plusieurs régimes au cours de leur carrière. « C'est un problème d'échanger des informations entre les caisses de retraite et le fisc, mais ce n'est pas impossible. Ils communiquent déjà pour savoir quel taux de CSG paient les retraités en fonction de leurs pensions. C'est bien que les tuyaux existent entre les deux », explique un bon connaisseur du dossier.L'autre défi, si cette solution est retenue, ce qui n'était pas encore tranché hier, est celui du temps : les mécanismes permettant les échanges d'information entre le fisc et les caisses devront être prêts au plus tard en octobre.En plus des petites retraites, le gouvernement a également décidé de ne pas geler les mesures du plan pauvreté jusqu'en octobre 2015, comme il l'avait décidé initialement. Le délai sera raccourci, il pourrait être de six mois seulement au lieu de douze.