Matignon, l'hôtel Crillon, celui de la Marine, la cathédrale de Chartres, châteaux, ambassades, églises, monastères… La liste est longue des joyaux du patrimoine français passés par les soins des compagnons, charpentiers, menuisiers, ébénistes ou ferronniers d'art des Ateliers Perrault Frères… Cette entreprise établie à Saint-Laurent-de-la-Plaine (Maine-et-Loire) depuis 1760, est experte dans la rénovation, la restitution et la copie de constructions et de boiseries anciennes. Perrault sait marquer les esprits par des réalisations spectaculaires comme, dans les années 2000, la construction de la plate-forme d'observation antarctique Concordia, en bois, ou la dépose du beffroi de l'église parisienne Saint-Sulpice. C'est ce long parcours hors normes et la singularité de son activité qui valent aujourd'hui à l'entreprise le Grand prix régional Les Chênes, trophée de l'entreprise familiale 2014 organisé par la Société Générale et dont « Les Echos » sont partenaires.Parmi les chantiers en cours, le PDG, François Perrault, quarante-neuf ans, représentant la 8e génération à la tête de l'entreprise, évoque le beffroi de Val-d'Izé, en Bretagne, la réfection d'un chais bordelais ou l'hôtel Peninsula, à Paris, en menuiserie et ferronnerie. Les équipes de Perrault travaillent aussi sur une charpente de grandes dimensions à Koweit City. Si l'international représente 10 % du chiffre d'affaires (25 millions d'euros avec les filiales en Dordogne), François Perrault aimerait pousser davantage les feux hors de France. Le marché national s'avère peu dynamique et très concurrentiel tandis que le marché américain, qui s'était affaissé après 2008, reste à reconquérir. « La France est reconnue pour sa culture, ses savoir-faire, il faut sortir des sentiers battus, aller chercher ces marchés », estime le dirigeant, qui veut aussi confirmer de premiers succès en Russie.

Transmission des savoirs

Chez Perrault, le bois est la base de tout, une passion partagée. L'entreprise maîtrise cette matière depuis sa première transformation. Elle dispose, à Saint-Laurent, d'un stock de 3.000 m3, unique par la diversité de ses essences. L'entreprise s'est aussi constitué une bibliothèque de 4.000 ouvrages, base documentaire dans laquelle tous les compagnons peuvent venir puiser. La transmission des savoirs est ici une valeur première. « Sur 160 salariés (220 avec les filiales), 15 % sont en formation, principalement en alternance », détaille François Perrault, lui-même titulaire d'une formation en première et deuxième transformation du bois, complétée par un cursus en gestion.L'amour du patrimoine et des savoir-faire ancestraux n'exclut pas l'innovation, la veille technologique et l'investissement constant, dans les outils numériques notamment. La rénovation doit aussi répondre aux besoins des utilisateurs et au confort contemporain. Perrault multiplie dès lors les certifications et les nouveaux produits comme cette gamme de fenêtres Grands Boulevards, bois ou bois-aluminium, épousant l'esthétique des bâtiments anciens mais répondant aux dernières normes thermiques, acoustiques et, au besoin, pare-balles. Un brevet vient aussi d'être déposé pour des fenêtres à guillotine, à l'anglo-saxonne.En 2010, Perrault a célébré son 250e anniversaire, ce qui en fait l'une des plus anciennes sociétés de sa région. Cette longue histoire pourrait donner lieu à un récit depuis le fondateur, Pierre Perrault, charpentier et charron, qui participa aux uerres de Vendée, à l'actuelle génération en passant par une succession de dirigeants… et toujours le même patronyme. Naturellement, François Perrault, qui a succédé à son cousin Jean en 2003, ambitionne de réussir, à terme, une transmission familiale « dans cette génération ou la suivante ».