Les Français méritent bien leur réputation de râleurs invétérés. A en croire, du moins, le dernier baromètre Ipsos-Edenred sur « le bien-être et la motivation » des salariés européens publié hier. Selon cette enquête menée en janvier auprès de 8.800 salariés de huit pays, dont la France, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et la Grande-Bretagne, les salariés français affichent un moral en berne et beaucoup d'insatisfaction. Pas moins de 38 % d'entre eux reconnaissent un moral en chute, contre 29 % en moyenne chez l'ensemble des sondés. De même, ils ne sont que 59 % à avoir confiance dans l'avenir de leur entreprise, un niveau comparable aux Italiens et aux Portugais, mais loin derrière les autres nationalités (80 % en Allemagne). Et ce n'est pas auprès de leurs collègues et supérieurs qu'ils trouvent du réconfort : les employés français estiment aussi que leur travail est trop peu reconnu (52 %, contre 46 % des Européens) et qu'ils ne sont pas assez respectés (43 % contre 33 %). Pour achever le tout, six sur dix s'estiment trop peu payés, contre seulement la moitié des Européens.Mais, paradoxe là aussi typiquement français, cela ne les empêche pas de se dire… aussi heureux que les autres au travail ! C'est le cas de 88 % des salariés sondés dans l'Hexagone, comme dans le reste des pays, où cette proportion varie autour de 90 %. Les Français attribuent au final une note de 6,2 sur 10 à la qualité de leur vie au travail, un score comparable à celui donné par les Italiens et les Espagnols. Il reste toutefois loin des 6,7 à 7,1 sur 10 attribués par les Allemands, les Anglais, les Suédois et les Belges, qui s'affirment tout au long de l'étude comme les salariés les plus satisfaits de leur sort. Question de culture, mais aussi de dynamisme économique, tant l'étude dessine elle aussi en creux une Europe à deux vitesses.

La vie professionnelle empiète sur la vie privée

L'étude met par ailleurs en lumière un phénomène croissant dans l'ensemble des pays : l'effacement de la frontière entre vie privée et vie professionnelle, dit effet « blurring ». Deux salariés sur trois disent être sollicités par leur travail en dehors de leurs horaires professionnels, dont 49 % de temps en temps et 18 % souvent. Ce chiffre atteint 80 % chez les managers. Le développement des nouvelles technologies accompagne et entretient ce phénomène : près d'une entreprise sur deux (46 %) équipe ses employés avec un téléphone portable ayant une connexion Internet. La France se situe dans la moyenne haute (55 %), la Belgique étant le pays le moins équipé, loin derrière la Suède, où la proportion atteint 94 %. Au point que le temps passé au travail est cité comme la préoccupation numéro un par les Suédois. En Allemagne, il arrive au même niveau que le maintien de l'emploi et les rémunérations. En revanche, en France, les salariés accordent davantage d'importance à leur salaire ou à la préservation de leur poste.