Cela faisait longtemps que les marchés de la zone euro n'avaient pas subi un vrai coup de froid. Hier, après des données économiques décevantes et la montée d'inquiétudes politiques, l'enthousiasme des derniers mois s'est subitement envolé. La Bourse de Milan a chuté de 3,61 %, celle de Madrid de 2,35 % et celle de Lisbonne de 2,65 %. Dans le sillage de ces places, Paris a perdu 1,25 % et Francfort 1,01 %.Les tensions ont également été très fortes sur les emprunts d'Etat de la « périphérie », rappelant de mauvais souvenirs aux trésoriers de ces pays. Les taux à 10 ans de la Grèce se sont envolés de 50 points de base, à 6,81 %. L'Italie, l'Espagne et le Portugal ont vu leur coût de financement grimper de 19, 16 et 18 points respectivement. Parallèlement, les taux de l'Allemagne et de la France se sont, eux, assez nettement détendus. Comme si les investisseurs rejouaient, le temps d'une séance, la crise de la zone euro, en distinguant les « mauvais élèves » des « bons »...Le PIB dans la zone euro a fait l'effet d'une douche froide. A 0,2 % au 1er trimestre, la croissance s'est révélée deux fois moins soutenue qu'attendu. Surtout, en dehors de l'Allemagne et de l'Espagne qui semblent récompensées de leurs efforts, les chiffres tombent comme une sanction. L'économie italienne a notamment rechuté en début d'année. Les difficultés de la zone euro, et notamment des pays du Sud, sont donc loin d'être résolues. Même le Portugal, qui s'est tant serré la ceinture et qui doit sortir dans les jours qui viennent du plan d'aide FMI-Union européenne, reste extrêmement fragile.Le tableau idyllique auquel les investisseurs croyaient depuis des mois était-il un mirage ? Le doute s'immisce alors que les investisseurs se sont rués sur les émissions obligataires de la « périphérie » - la Grèce a même fait un retour triomphal deux ans seulement après sa faillite - sans se soucier des niveaux d'endettement toujours élevés. Les coûts d'emprunt de l'Italie et de l'Espagne ont même chuté à des niveaux jamais vus sur les marchés depuis la création de l'euro.

Impôt sur les titres grecs

Les tensions d'hier ont aussi été alimentées par une résurgence du risque politique, après un sondage en Grèce, à une semaine des élections européennes. « Il y a une soudaine prise de conscience que le sentiment au sujet de la Grèce peut changer », explique Michael Michaelides, chez RBS. « Cela peut arriver soit parce que le Pasok implose, soit parce que le parti Syriza remporte une large victoire. » Ce que les marchés craignent, c'est que les réformes soient stoppées. Un autre facteur a semé le trouble : l'évocation d'un impôt rétroactif sur les plus-values réalisées par des investisseurs étrangers sur des titres grecs. Le gouvernement a dû démentir tout changement de règles sur les opérations effectuées entre 2012 et fin 2013. « Mais les incertitudes ne sont pas complètement levées », pointe RBS.