A l'occasion de l'enquête mensuelle de conjoncture de la Banque de France, les chefs d'entreprise ont pour la première fois exprimé leur sentiment sur leur activité au lendemain des élections législatives.

Sans surprise, ils restent dans l'expectative. Le sentiment d'incertitude qui avait brutalement rebondi au lendemain de l'annonce de la dissolution de l'Assemblée est certes un peu retombé mais sans revenir au niveau qu'il affichait avant ce coup de théâtre politique. « Le climat d'attentisme perdure », résume Olivier Garnier, le chef économiste de la banque centrale.

Cet été, les Jeux Olympiques de Paris apportent donc un souffle bienvenu à l'activité. Selon la Banque de France, ils devraient assurer un surcroît de croissance de 0,25 point au troisième trimestre, un chiffre proche de celui avancé par l'Insee avant la dissolution (0,3 point). La croissance progresserait ainsi dans une fourchette de 0,3 % à 0,5 % sur la période, l'activité, hors JO, étant attendue en hausse modeste de 0,1 à 0,2 %. En juillet, l'activité a, selon l'institution monétaire, progressé dans les services marchands - exception faite des restaurants et du travail temporaire - et le bâtiment grâce au second oeuvre mais elle est restée étale dans l'industrie, alors qu'une petite amélioration était espérée. « La suspension du dispositif d'aide à la location de véhicules électriques a eu un fort effet négatif », selon Olivier Garnier. « Mais, reconnaît-il, notre estimation de croissance pour le troisième trimestre est entourée d'une incertitude encore plus forte que d'habitude. »

Retournement du moral des chefs d'entreprise

Et pour cause. L'« effet JO » reste difficile à évaluer, en particulier les retombées sur le tourisme de l'événement. Surtout, le contexte politique plonge l'économie française dans un épais brouillard, après un début d'année meilleur que prévu - la PIB a augmenté de 0,3 % au premier et au deuxième trimestre, selon l'Insee.

De fait, la dernière enquête de conjoncture de l'Institut de la statistique a pointé un retournement spectaculaire du moral des chefs d'entreprise. Le climat des affaires a chuté de 5 points en juillet, un recul d'une ampleur qui n'avait pas été observée depuis l'été 2011, au moment de la crise des dettes souveraines hormis pendant la pandémie de Covid. Pour les patrons, les perspectives se sont assombries avec l'instabilité politique qui se profile. Un refroidissement de l'activité est attendu dans tous les secteurs d'activité. Ce qui fait planer la menace d'« un investissement plus faible et d'un marché du travail moins dynamique », ont alerté dans une note les experts d'HSBC.

Au deuxième trimestre de cette année, l'emploi salarié dans le secteur privé est, certes, resté quasi stable, et le taux de chômage a même légèrement diminué sur la période. Mais quelques clignotants négatifs s'allument : par exemple, en juillet, pour le troisième mois d'affilée, l'intérim - qui est un indicateur avancé de l'emploi - est en recul, selon la Banque de France.

Reste à voir si la baisse des taux d'intérêt espérée en septembre redonnera de l'air à l'activité et au marché immobilier en réduisant le coût du crédit. Le comportement des Français sera l'autre grande inconnue de la rentrée. Bien que les salaires continuent à augmenter plus vite que les prix, ils sont pour l'instant restés très prudents dans leurs dépenses. « Il faudra voir si l'attentisme très probable des entreprises s'étend aux comportements de consommation et d'épargne des ménages », observait récemment dans « Les Echos », Denis Ferrand, le directeur général de Rexecode.