C'est un peu l'histoire du verre à moitié plein et à moitié vide. En matière d'inégalités de salaires entre femmes et hommes, la tendance est toujours à la baisse mais la différence demeure. Entre 1995 et 2022, l'écart en matière de revenu salarial s'est réduit de 30 %. Mais la rémunération des femmes reste tout de même encore en moyenne inférieure de 23,5 % à celles des hommes dans le secteur privé, selon l'étude annuelle publiée mardi par l'Insee, à trois jours de la Journée des droits des femmes. Cela représente un écart financier de 6.000 euros par an (19.980 euros contre 26.110 euros).La baisse des inégalités salariales constatée depuis trente ans par l'Institut statistique tient pour partie à une augmentation du temps de travail des femmes, dont l'écart avec les hommes est passé de plus de 14 % à 10,1 %. Mais à temps de travail équivalent, la différence frôle encore les 15 %.Certes, la tendance est à la baisse sur ce plan aussi depuis 2000, où ce taux dépassait les 22 %. Certes, on constate même une légère accélération dans ce sens depuis 2015. Mais on est loin de l'épaisseur du trait, et surtout l'importance du décalage est liée à un facteur structurel : la nature même des emplois occupés. La division sexuée du travail est tenace entre les professions et les secteurs (l'infirmière et le médecin ; les services aux personnes âgées versus la construction), même si là aussi les choses évoluent, les femmes représentant par exemple environ 60 % des nouveaux médecins.

L'écart croît avec l'âge

A poste comparable, soit la même profession chez le même employeur, l'écart entre femmes et hommes s'est réduit à 4 % en 2022, souligne l'Insee. Un chiffre encourageant. Mais comparer à poste, profession et entreprise identiques ne permet pas de mesurer l'effet des différences d'évolution de carrière qui pèsent lourd dans la progression salariale, et ce phénomène de plafond de verre constitue d'ailleurs le ciment des contentieux en discrimination devant les tribunaux.La progression du poids des femmes parmi les cadres a contribué à réduire l'écart salarial à durée du travail égale (23 % de cette population était féminine en 1995, contre 37 % en 2022). Elle a fait progresser la moyenne des rémunérations des salariées. Mais il reste du chemin à parcourir. C'est chez les cadres que l'écart des rémunérations pour un temps plein est le plus élevé (15,7 %) devant les ouvriers (13,5 %). Et les femmes sont très peu représentées dans les plus hauts salaires : elles ne sont que 18 % parmi les 1 % des salariés les mieux payés.Preuve que les inégalités se sédimentent au long de la vie professionnelle, l'écart de rémunération croît avec l'âge. En équivalent temps plein, il était en 2022 de 4,7 % chez les moins de 25 ans contre 19,9 % chez les quinquagénaires, et même 26,1 % chez les 60 ans et plus. La progression est énorme. Sachant que les différences sont maximales dans les très grandes entreprises (plus de 5.000 salariés) suivies par les PME de 50 à 1.000 salariés.Le croisement entre le sexe et la situation familiale amène à un second point de vigilance majeure pour comprendre comment se construisent les inégalités. Sans surprise, l'écart de volume de travail est plus important entre les mères et les pères que pour les autres salariés. Mais surtout, en équivalent temps plein, donc en isolant cet effet, l'écart de salaire est multiplié par près de cinq, de 6,1 % entre les salariés sans enfants à 29,5 % entre mères et pères de trois enfants et plus.