Le point de départ pour y voir clair est de télécharger son relevé de carrière. Vous pouvez obtenir ce précieux document à tout âge en créant votre compte sur le portail info-retraite.fr, comme l'ont déjà fait plus de 16,2 millions de personnes. Avantages par rapport aux autres comptes personnels que vous pouvez créer sur les sites de différents régimes de retraite (retraitesdeletat.gouv.fr, cnracl.retraites.fr, lassuranceretraite.fr, agirc-arrco.fr…) : vous aurez une vision globale de vos droits, et non spécifique à vos derniers régimes d'affiliation. Pensez à télécharger ce relevé tous les ans, afin qu'il soit réactualisé.

Pointer ses trimestres

La durée d'assurance ou nombre de trimestres nécessaires pour obtenir des pensions à taux plein a été rehaussée par la dernière réforme des retraites : il en faut désormais 169 à 172 selon les générations. Soit, à terme, 43 années travaillées.

Ces trimestres (4 par an maximum) peuvent avoir été acquis de différentes façons : par les cotisations obligatoirement versées dans les quelque 25 régimes de base des salariés et des non-salariés (exploitants agricoles, professionnels libéraux, salariés de régimes spéciaux…), au titre de périodes pour lesquelles vous avez connu un « aléa » de carrière (maladie, maternité, congé parental, chômage, service national…) ou comme majoration pour les enfants. « Attention aux trimestres non reportés en temps réel sur les relevés de carrière, dont la régularisation n'a souvent lieu qu'au moment de la demande de pension », prévient Bruno Renardier, dirigeant de Novelvy Retraite. Il en va ainsi par exemple des trimestres pour périodes de chômage non indemnisé (un trimestre attribué tous les 50 jours de chômage, si cette période a succédé immédiatement à du chômage indemnisé, dans la limite de 6), des trimestres attribués aux parents d'un enfant handicapé ayant un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 % (un trimestre par période de 30 mois civils, dans la limite de 8) ou encore aux trimestres effectués à l'étranger.

« Pour certains profils, ces trimestres vont permettre d'atteindre plus vite le taux plein. Ils doivent donc être intégrés dans toute stratégie de départ en retraite. Pour cela, il faut pointer au préalable chaque événement potentiel de sa vie et se renseigner sur les droits qu'ils peuvent procurer », conseille Bruno Renardier.

Compter ses points

Pour les salariés, et surtout pour les cadres, la retraite Agirc-Arrco, qui n'est pas plafonnée en montant contrairement à la retraite de base (1.932 € maxi pour 2024 hors majorations éventuelles), est souvent la pension la plus élevée. Contrôler le nombre de points obtenus chaque année fait donc partie des impondérables, sachant que d'année en année, leur nombre ne va pas toujours croissant.

« Une baisse de points peut en effet être constatée par les personnes dont le salaire n'aurait pas augmenté dans les mêmes proportions que le plafond de la Sécurité sociale, tenant compte également de l'évolution de la valeur d'achat du point Agirc-Arrco, ou encore en raison d'un événement dans la carrière comme une période de chômage indemnisé ou de maladie », explique Catherine Sala, responsable de service relations clients à l'Agirc-Arrco.Autre situation, plus extrême : celle où aucun point n'est crédité alors que pour cette même année, des trimestres le sont. « Ces écarts ne sont pas heureusement pas fréquents. Ils concernent souvent des périodes anciennes qui peuvent être corrigées à tout moment, en transmettant, en ligne ou par courrier, une copie des bulletins de salaire, les attestations de versement d'indemnités journalières par la Sécurité sociale ou encore les attestations de France travail », souligne Catherine Sala.

Pour autant, s'il est relativement facile de vérifier la cohérence de vos droits, s'assurer de leur exactitude suppose de connaître, au-delà des salaires soumis à cotisations, « les tranches de cotisations qui existaient au fil des années, les taux contractuels de cotisation ou les taux de chaque entreprise si ceux-ci étaient plus élevés, ainsi que les valeurs annuelles d'achat des points », fait remarquer Bruno Renardier. Un travail bien pluslong qu'un simple coup d'oeil à son relevé de carrière, mais possible (presque toutes les données sont disponibles en ligne) sous réserve de se donner du temps pour l'effectuer !

Arbitrer entre surcote et cumul emploi retraite

Pour tous ceux qui, retraités, souhaitent retravailler sans contraintes, la question du « stop ou encore » en fin de carrière (une fois leur taux plein et leur âge légal respectivement atteints) se pose avec acuité. Pourquoi ? D'un côté, les pensions de retraite continuent de croître à la faveur d'une surcote (+5 % par an) en base, et de points complémentaires en Agirc-Arrco ; de l'autre, une fois à la retraite, on dispose d'une aisance financière (beaucoup) plus large, du fait de l'addition des pensions et des nouveaux revenus.Valérie Batigne, présidente et fondatrice de Sapiendo, estime que « pour se positionner, il faut savoir quel est l'objectif d'un cumul emploi retraite : disposer de revenus d'appoint additionnels, et dans ce cas, le cumul emploi retraite est plus approprié ; ou pouvoir s'appuyer sur des pensions plus importantes jusqu'à la fin de ses jours et dans ce cas, surcoter est plus intéressant ». Elle souligne par ailleurs combien « la réponse dépend aussi du niveau de salaire de fin de carrière et des droits qui sont acquis dans le cadre d'une nouvelle activité ». Pour trancher, servez-vous du simulateur officiel (sur info-retraite.fr, lassuranceretraite.fr ou sur agirc-arrco.fr pour les salariés du secteur privé) afin de mesurer, à terme, l'impact financier d'un choix ou d'un autre sur vos pensions.

Fixer judicieusement sa date de départ

Positionner sa date de départ en retraite (date de versement des premières pensions) par rapport à sa date anniversaire est un réflexe on ne peut plus courant… Ce n'est pas forcément le meilleur ! Pourquoi ? Parce qu'en fin de carrière, certains éléments ont une importance toute particulière. Certes, travailler jusqu'à la toute fin de l'année civile (ou bénéficier d'un éventuel compte épargne temps jusqu'au 31 décembre) permet d'acquérir à coup sûr 4 trimestres et d'intégrer cette pleine et dernière année dans le quota des 25 meilleures, nécessaires au calcul de la pension de base.En parallèle, travailler un mois de plus l'année suivante et demander sa retraite non pas pour un 1er janvier, mais pour un 1er février, permet de réduire la pression fiscale, ou du moins de ne pas changer de tranche marginale d'imposition à la faveur d'une indemnité de fin de carrière élevée.Ce que l'on sait moins en revanche, c'est l'impact que peut avoir l'une ou l'autre de ces décisions sur la pension Agirc-Arrco. Supposons ainsi un salaire de 120.000 € bruts annuels, un solde de tout compte entièrement soumis à cotisations (IFC incluse) de 60.000 € bruts et les paramètres de calcul (plafond annuel de la Sécurité sociale = 46.368 €, prix d'achat du point = 19,6321 € et valeur dite de service de ce même point Agirc-Arrco = 1,4159 €/an) de 2024. Avec un départ en fin d'année, le salarié va acquérir 1303,59 points Agirc-Arrco, tandis qu'avec un départ fin janvier, il va acquérir en 1030,45 seulement (784,03 points pour 2024 + 246,42 points pour un mois supplémentaire de cotisations).Comment est-ce possible ? « Dans le premier cas, toutes les sommes, dont l'indemnité de fin de carrière, sont soumises à cotisations, car elles entrent dans la limite d'assiette fixée à 8 plafonds annuels de la Sécurité sociale (PASS). Dans le second cas, le contrat de travail étant rompu le 31 janvier 2025, l'indemnité de fin de carrière et le salaire mensuel, tous deux perçus en janvier, seront soumis à cotisations, mais dans la limite de 8 plafonds mensuels de sécurité sociale, soit 30 912€, ce qui de facto génère moins de points pour le salarié », décrypte Catherine Sala.Si l'on fait fi d'une hausse ponctuelle de l'impôt (plus élevé pour un départ en fin d'année, même si le solde de tout compte est fiscalement considéré comme un revenu exceptionnel), partir un peu plus tard ans n'est pas la solution la plus judicieuse dans cet exemple, car 273,14 points Agirc-Arrco de moins, c'est un manque à gagner viager de 386,73 € bruts par an (hors revalorisations) !