Les technologies d'intelligence artificielle progressent de jour en jour. Après le lancement de ChatGPT fin 2022, une vague d'assistants IA a vu le jour, dont Copilot (Microsoft). Ces outils aident à trouver plus rapidement des informations, faire des comptes-rendus, prérédiger des mails… Des taches assez simples mais qui prennent beaucoup de temps dans une journée.Depuis plusieurs mois, ce sont les « agents IA » qui font leur arrivée sur le marché. Des assistants augmentés qui traitent des instructions complexes et exécutent une suite de taches. Le tout en se connectant à des logiciels, applications et API (sorte de connecteurs sécurisés).Par exemple, lors de l'arrivée d'un nouveau salarié, le service RH peut déclencher une série de procédures - inscription à la mutuelle, commande de titres-restaurant… Dans une de ses dernières études, le fournisseur de data PitchBook estime que ces agents IA ont « le potentiel de perturber les modèles des entreprises traditionnelles et les interfaces, tout en contribuant à des gains de productivité dans tous les secteurs ».
Les Français qui émergent
Cette opportunité a évidemment été saisie par les start-up qui développent soit des grands modèles de langages (LLM), soit des logiciels. La jeune pousse française H, qui fait partie de la première famille, a récemment bouclé un tour de table en amorçage de 220 millions de dollars. Même si trois cofondateurs (sur cinq) ont quitté la société depuis, elle prévoit de sortir des premiers modèles d'ici la fin de l'année.Dans la deuxième famille, plusieurs Français ont commencé à développer des plateformes d'assistants « améliorés » ou d'agents basés sur des modèles ouverts ou fermés. Parmi eux, Twin Labs (cofondée par Hugo Mercier, ancien patron de Dreem), Lampi AI ou encore Dust (créé par un ex-OpenAI et un ex-Alan). En un an, cette dernière a levé plus 20 millions de dollars (notamment auprès de Sequoia Capital) et a atteint 1 million de revenus annuels récurrents, indicateur phare dans le monde du logiciel.Les Américains ne sont évidemment pas en reste, mais pas forcément plus en avance. « C'est un marché qui n'est pas plus structuré qu'en Europe », expliquait Gabriel Hubert aux « Echos » lors de sa dernière levée de fonds en juin. Plusieurs noms ont émergé comme Adept, qui a atteint le statut de licorne et conclu un accord de licence avec Amazon, ou bien Imbue, qui a levé 200 millions de dollars en octobre 2023 pour accélérer son « développement de systèmes d'IA capables de raisonner et de coder », est-il précisé dans un communiqué. « A terme, nous espérons mettre sur le marché des systèmes permettant à chacun de créer des agents IA robustes et personnalisés afin de mettre la puissance productive de l'IA à la portée de tous. » D'après PitchBook, les projets open source tels que AutoGPT et AgentGPT gagnent aussi du terrain au sein de la communauté des développeurs. « Demain, on peut même imaginer qu'avec des agents IA, une start-up pourra créer une boîte qui vaudra 1 milliard », avance Philippe Battel, vice-président IA Europe, Moyen-Orient et Afrique chez Oracle.Généralistes ou spécialisés
Si de nombreux projets open source et de start-up se positionnent sur des agents généralistes, d'autres se spécialisent sur des secteurs. « Certaines entreprises vantent déjà leur capacité à prendre en charge complètement certaines tâches comme l'automatisation des systèmes d'assistance à la clientèle, ce qui permet de remplacer un grand nombre d'employés dans les centres d'appels », notent les auteurs de l'étude PitchBook.La start-up française Aive, spécialisée dans la postproduction de vidéo, travaille aussi sur une « IA agentique ». « Pour l'instant, on génère différents formats à partir d'une vidéo en quelques minutes. Demain, notre agent Aive déterminera quel format sera le mieux pour quel canal et distribuera la vidéo où il faut », explique Olivier Reynaud, cofondateur d'Aive, qui prévoit ce niveau d'autonomie en 2025.Si les start-up avancent vite, les géants de la tech ont aussi pris le train des agents IA. Marc Benioff a récemment déclaré que Salesforce allait opérer un « pivot dur » vers les agents personnalisés en commençant par l'automatisation d'une partie de la relation client avec sa plateforme Agentforce.AWS travaille avec Anthropic, grand rival d'OpenAI, tandis que Microsoft a « débauché » Mustafa Suleyman (un des créateurs de DeepMind) pour diriger sa division IA grand public. Ce dernier avait cofondé Inflection AI, une des start-up les plus en vue dans le domaine des assistants IA.Le développement de ces agents ne se fera pas sans obstacle. Pour exécuter correctement une série de tâches, il faut que les entreprises aient des sets de données à jour et bien structurés. La question du coût est aussi centrale. Permettront-ils vraiment de faire des économies ? « Le déploiement d'agents LLM à grande échelle nécessite des ressources de calcul substantielles et l'utilisation de crédits cloud coûteux », pointent les auteurs de l'étude PitchBook, qui mentionnent également les questions de conformité. Les réglementations autour de l'intelligence artificielle, qui commencent à fleurir partout dans le monde, toucheront probablement ces supers assistants.