Plus de 25 % des emplois existants seront fortement affectés par les politiques visant à ramener à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre. Pour Stefano Scarpetta, le directeur de l'emploi, du travail et des affaires sociales à l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), la transition énergétique aura un effet sur les emplois bien au-delà du secteur de l'énergie, touchant de nombreuses professions, des chauffeurs de bus aux ouvriers du bâtiment en passant par les agriculteurs.
Pour l'Organisation, qui a présenté mardi ses perspectives de l'emploi, il n'est pas envisageable d'échapper à ces politiques visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. « Réduire les ambitions climatiques n'est pas une option viable, les coûts à long terme de la hausse des températures étant certainement bien plus graves », avertit le responsable en préambule du rapport.
Par exemple, une température supérieure à 40 °C augmenterait le risque d'accidents du travail de plus de 10 %. En Europe, les régions de Grèce (Péloponnèse, Grèce-Centrale), d'Italie (Sicile, Apulie), d'Espagne (Andalousie, Asturies) sont particulièrement vulnérables au réchauffement climatique.
Stefano Scarpetta s'alarme du fait que le risque de pertes d'emplois et de salaires dans certains secteurs, combiné à une inflation plus forte, pourrait inciter les dirigeants politiques à ralentir le rythme de la transition ou à y renoncer. Ce serait une erreur fondamentale.D'autant que les prévisions ne sont pas si alarmantes que certains avancent pour peu que les pouvoirs publics adoptent des politiques de soutien. « Il paraît peu probable que la transition entraîne, en termes nets, une contraction du nombre total d'emplois. A long terme, l'impact serait plutôt positif », avance Stefano Scarpetta. Mais il importe de veiller à ce que les mesures relatives à la lutte contre le changement climatique s'accompagnent de politiques sociales et économiques pour en atténuer les conséquences négatives sur certains emplois.Disparités entre zones
Selon l'OCDE, d'ici à 2030, dans l'UE, l'emploi dans des secteurs tels que la fourniture d'énergie issue de ressources fossiles, les services de transport, les activités extractives et la fabrication de produits gourmands en énergie (80 % des émissions mais 7 % des emplois) devrait reculer de quelque 14 %, soit 9 points de pourcentage de plus que dans un scénario où les pouvoirs publics observent un statu quo.Ces salariés, pour faciliter leur transition vers des emplois plus verts devront bénéficier de mesures de formation et de mobilité bien ciblées. « Il faut aider les régions à investir dans les énergies renouvelables tout en promouvant la mobilité des salariés », préconise Stefano Scarpetta.L'OCDE observe en effet une disparité entre les zones rurales et les zones urbaines. Les industries à fortes émissions sont fortement concentrées dans des régions spécifiques et principalement rurales. Les professions qui connaissent la croissance la plus rapide, stimulées par la transition énergétique et nécessitant d'importantes compétences sont, elles, principalement situées en zone urbaine.« Sans action politique, les employés peu qualifiés et les ménages des zones rurales supporteraient l'essentiel du fardeau de la transition, tandis que les travailleurs urbains hautement qualifiés seraient les mieux placés pour en récolter les fruits », avertit l'Organisation. C'est un point essentiel qui explique, en partie, le vote de certains électeurs en faveur de mouvements politiques populistes et extrêmes en Europe. A méditer.