Ce matin, la France se réveille un peu plus riche et un peu moins endettée. Coup de baguette magique ? Envolée des ventes de voitures Peugeot et d'Airbus à l'étranger ? Création la nuit dernière d'un Apple et un Google dans l'Hexagone ? Non, l'affaire est moins heureuse. Il s'agit simplement d'un changement statistique. Après de longues années de discussions, les économistes et statisticiens de tous les pays se sont mis d'accord pour faire évoluer la comptabilité nationale. Un changement qui répond au doux nom de Système européen de compte 2010 (SEC 2010). Et celui-ci entre en vigueur aujourd'hui, lors de la présentation par l'Insee des chiffres du PIB (produit intérieur brut) au premier trimestre.Le premier changement concerne la prise en compte des dépenses de recherche et développement (R&D). Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, ces dernières étaient considérées comme des consommations intermédiaires, rentrant dans la fabrication des biens et services produits, mais ne participant pas directement à la formation du PIB. C'est fini. Les dépenses de R&D seront désormais comptabilisées comme des investissements, qui rentrent eux dans le calcul du PIB. « Il en résultera une révision substantielle à la hausse du niveau du PIB », explique l'Insee. En revanche, « l'évolution dans le temps du PIB, c'est-à-dire la croissance, et le diagnostic sur la conjoncture actuelle, eux, ne changeront pas », souligne un statisticien.
Dépenses et recettes relevées
Autre évolution, les achats de bases de données et d'équipements militaires vont être considérés comme des investissements. Les crédits d'impôts (crédit d'impôt recherche, etc.) seront par ailleurs comptabilisés comme des dépenses pour l'Etat alors qu'auparavant, ils étaient considérés comme un manque à gagner de recettes. « Ce nouveau traitement relève les dépenses publiques et les recettes publiques », note l'Insee. Et le versement des soultes par des entreprises publiques à l'Etat sera désormais étalé dans le temps. Des changements, anecdotiques, vont aussi affecter les sociétés financières.Eurostat, l'institut statistique européen, a prévenu que la richesse nationale produite devrait ainsi grimper de l'ordre de 2 % à 3 % pour la France, tout comme pour l'Allemagne et la Belgique. La Grande-Bretagne, elle, devrait un peu plus bénéficier de cette évolution puisque son PIB devrait être revu en hausse de 3 % à 4 %. Au total, les Etats européens devraient voir leur richesse augmenter de 2,4 %, dont 1,9 % proviendra du changement affectant les dépenses de R&D. Pour rappel, quand les Etats-Unis ont mis en place ces changements, en août 2013, le PIB américain a crû de 3,5 %, dont 2,5 points étaient attribuables à la R&D.Dette publique : le seuil des 100 % s'éloigne
L'augmentation du PIB va entraîner la modification de tous les ratios exprimés en part de richesse nationale. Le déficit bien sûr (mais l'effet sera très faible), et surtout la dette publique. Selon les calculs effectués par les économistes de la Société Générale, alors que, fin 2013, la dette brute de la France représentait 93,5 % du PIB, elle devrait s'établir entre 91,1 % et 92 % du PIB au premier trimestre 2014. De quoi éloigner la menace d'un franchissement du seuil symbolique des 100% de PIB. Mais le montant nominal de la dette et le service de la dette de l'Hexagone en euros ne baisseront pas pour autant.