Tout juste de retour aux affaires et déjà sur le front. Ségolène Royal a annoncé hier, à Poitiers, son intention de « remettre à plat les choses » concernant l'écotaxe. « Les Français ont déjà payé beaucoup d'impôts supplémentaires, l'écotaxe est un impôt, j'en comprend bien le sens : il s'agit de taxer ceux qui polluent, mais j'ai toujours dit que, pour respecter la citoyenneté, l'écologie ne doit pas être punitive et on ne doit pas taxer des gens s'ils n'ont pas le choix de prendre le transport propre », a-t-elle enchaîné. L'impôt honni des industriels et des agriculteurs, notamment bretons, sur lequel le gouvernement Ayrault s'est cassé les dents, pourrait être écarté au profit d'autres solutions. C'est ce que suggèrent les propos de la nouvelle ministre de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie, qui indique souhaiter « voir quelles sont les autres possibilités ». Quelles que soient les alternatives qui seront trouvées, elles devront permettre de dégager des financements en direction des routes et du rail, a indiqué en substance Ségolène Royal.
Un dossier lourd de conséquences
La numéro trois du gouvernement s'est attaquée sans tarder à un dossier déjà très lourd de conséquences. La suspension sine die de l'écotaxe, décidée sous le précédent gouvernement, revient à amputer de 450 millions d'euros cette année les sommes consacrées à la construction et la rénovation des routes et des voies ferrées. L'Etat doit verser de 40 à 50 millions d'euros par trimestre de pénalités de retard à Ecomouv', la société qui a réalisé et gère l'infrastructure. Un abandon définitif pourrait revenir à 2 milliards. Une mission parlementaire examine actuellement les modalités juridiques du contrat, assez controversé, qui lie l'Etat au consortium Ecomouv'. Elle doit aussi proposer des scénarios d'aménagement du système. Une des rares pistes esquissées pour l'instant, mais vite effacée, consisterait à régionaliser l'écotaxe. L'ex-présidente de la région Poitou-Charentes, qui s'est avancée sur le terrain de l'écotaxe sans attendre de connaître les conclusions des travaux de cette instance, n'a pas fait mention de ce schéma, ni d'aucun autre. Son projet de remise à plat de cette taxe écologique donne des sueurs froides aux associations environnementales. « Toute une ingénierie de contrôle acceptée par tous les acteurs, dont les camionneurs, a été mise en place. Il faut en profiter. Sans écotaxe, ce sont les contribuables locaux qui vont payer l'entretien des routes », plaide-t-on chez France Nature Environnement (FNE). Ses représentants sont opposés à toute régionalisation de l'écotaxe. Avec elle, les exonérations pourraient se multiplier, redoutent-ils. « Si Mme Royal veut supprimer l'écotaxe, nous y sommes tout à fait favorable. Mais nous ne voulons pas d'une fiscalité de substitution », considère de son côté Nicolas Poulissen, le délégué général de la Fédération nationale des transports routiers (FNTR).Le dossier est loin d'être réglé. Le ministre de l'Agriculture et porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, a recadré hier soir sa collègue de l'Ecologie : le débat sur l'écotaxe « sera arbitré par le Premier ministre », a-t-il lancé. « Soit c'est un premier couac, soit c'est un abandon qui ne dit pas son nom », s'insurge déjà François de Rugy, coprésident du groupe EELV à l'Assemblée.