"Quand je suis revenu ici, grâce à Dieu, le même café et la même commande m'attendaient ", raconte cet ingénieur de 31 ans, attablé chez Dunkin Donuts dans l'une des rues les plus en vue de Ryad, la capitale saoudienne.

"J'ai recommencé à vivre comme aux Etats-Unis", se réjouit-il, illustrant combien l'Arabie saoudite, malgré son image de société cloîtrée et conservatrice, n'en est pas moins saturée d'influence occidentale, américaine notamment.  

Puissante monarchie du Golfe réputée pour son austérité religieuse, le pays abrite les deux sites les plus sacrés de l'islam et accueille chaque année des millions de pèlerins venus du monde entier. 

A titre d'exemple, le pays compte cependant à lui seul plus de 600 succursales de Dunkin Donuts, qui servent quotidiennement environ 250.000 personnes sur une population totale de 35 millions, selon la franchise.   

Buffalo Wild Wings, Chuck-e-Cheese et Starbucks, les grandes enseignes américaines s'alignent le long des routes, au pied des immeubles de bureaux et des centres commerciaux. De grosses cylindrées made in USA sont garées devant. 

Depuis 1945 et la célèbre poignée de mains entre le roi Abdelaziz Ibn Saoud et le président américain Franklin Roosevelt à la fin de la Seconde guerre mondiale, les deux pays entretiennent une relation étroite.

Les Etats-Unis se sont positionnés comme protecteurs militaires du royaume, en échange d'un accès privilégié à ses immenses réserves de pétrole.

- "Dans chaque quartier" -

Le rial saoudien est indexé sur le dollar, et les présidents américains sont des visiteurs réguliers — à l'image de Donald Trump, attendu à Ryad dans les prochains jours pour le premier grand déplacement à l'étranger de son second mandat.

Certes, la relation a connu des turbulences: embargo pétrolier des années 1970, attentats du 11 septembre perpétrés en grande partie par des Saoudiens, ou encore l'assassinat brutal du journaliste dissident Jamal Khashoggi.

Mais les liens restent profonds, alimentés par l'engouement des Saoudiens pour la cuisine, les voitures et les films américains.

" La seule chose sur laquelle on est toujours d'accord, c'est d'aller dans un resto américain — surtout Buffalo Wild Wings ", confie à l'AFP Dalal Abdulaziz, 28 ans, affirmant que les "chicken wings" (ailes de poulet) sont devenues l'un de ses plats préférés. 

" On trouve des restaurants américains dans chaque quartier ici. On en mange toutes les semaines, presque autant que la nourriture saoudienne", ajoute-t-elle.

Khaled Salman al-Dosari est d'accord, et estime même qu'il est difficile de trouver une rue en Arabie saoudite sans une marque américaine. 

"Les produits des entreprises américaines font partie intégrante de notre quotidien ", affirme cet étudiant de 21 ans. 

- Comme à la maison -

Si les entreprises américaines étaient déjà présentes depuis longtemps, l'ambitieux programme de réformes "Vision 2030" du prince héritier et dirigeant de facto saoudien, Mohammed Ben Salmane, visant à diversifier le royaume hors du pétrole, a ouvert de nouvelles opportunités.

Les concerts et les salles de cinéma étaient encore interdits il y a quelques années, mais aujourd'hui Jennifer Lopez se produit dans le pays et les combats de MMA et le catch professionnel américain font partie des nombreux divertissements proposés aux consommateurs saoudiens.

"Beaucoup d'Américains seraient surpris de voir à quel point les marques américaines sont omniprésentes en Arabie saoudite", commente Andrew Leber, politologue à l'université américaine de Tulane.

Certains voient même des similitudes, notamment en matière de climat et d'architecture entre Ryad, ville sèche et poussiéreuse aux larges boulevards de béton, et Dallas au Texas, parlant même d'un état d'esprit commun.

"Le Texas est proche de Ryad en termes de climat et ses habitants sont conservateurs, comme nous", assure Fahd, l'ingénieur en mécanique.

Ce goût américain des Saoudiens profite aux dizaines de milliers d'Américains qui travaillent sur place, dont beaucoup dans le secteur pétrolier.

"Ça me rappelle la maison et maintient le lien avec des lieux familiers depuis l'enfance ", décrit Joshua Dunning, 36 ans, développeur commercial américain employé dans une entreprise technologique saoudienne. "C'est toujours agréable de retrouver ces endroits et ces produits ici, en Arabie", dit-il.