Au sommet de l'Etat, on s'attend depuis de longs mois à de mauvaises élections européennes pour le PS. Mais à la veille du scrutin, c'est un scénario catastrophe que beaucoup redoutent. En 2009, les socialistes avaient obtenu un 16,48% peu glorieux, sauvant la deuxième place devant les écologistes. C'est à ce niveau qu'ils se situent dans le dernier sondage Ifop-« Paris Match » publié ce jeudi. « Pour 16-17 %, je signe tout de suite », avoue un ténor socialiste. Au sein de la majorité, certains n'excluent même pas une réédition de la déroute (14,49%) de 1994.

Quoi qu'il en soit, le PS paraît bien parti pour échouer à la troisième place, distancé par le FN (crédité de 23,5 % des intentions de vote) et par l'UMP (22 %). Une première. « Etre troisième, c'est violent », s'inquiète un haut responsable, qui voit se dessiner, huit semaines après les municipales, « le deuxième round du vote sanction ». « Dimanche soir, ça va faire peur », pronostique un secrétaire d'Etat.

Un « petit effet Valls » ?

Les dernières 48 heures peuvent-elles permettre à la majorité de limiter la casse ? François Hollande comme Manuel Valls veulent y croire, même si le geste fiscal promis à 3 millions de Français modestes dès 2014 n'a pas eu, jusqu'ici, le moindre effet dans les intentions de vote. « C'est maintenant que ça se joue pour la masse des indécis », font valoir leurs proches, rappelant que l'électorat est « très volatile ». L'espoir, c'est aussi celui d'un « petit effet Valls », même s'il est difficile de compenser « des éléments aussi lourds » que l'impopularité de l'exécutif et la désaffection des Français envers l'Union européenne (le scrutin sert souvent de vote défouloir).

A l'inverse des municipales, l'exécutif s'est impliqué dans la campagne des européennes. Le Premier ministre surtout, qui a mis les bouchés doubles dans le sprint final : il participe ce vendredi, à Lyon, à son troisième meeting en cinq jours. Le président, lui, s'est contenté d'un déplacement en Allemagne et d'une tribune. La forme et le fond ont fait grincer des dents. « Une tribune d'énarque », raille un socialiste. « Prendre la plume pour dire que c'est mal d'être contre l'Europe, c'est donner le sentiment que l'on est un indécrottable donneur de leçon qui ne comprend rien », dit un autre.

« Celui qui peut sauver le quinquennat, c'est Martin Schulz »

François Hollande joue très gros dimanche. Et pas seulement parce qu'un nouveau revers électoral en France - plus encore avec un FN en tête - l'affaiblirait encore davantage. Sur le terrain, le locataire de l'Elysée « cristallise toutes les formes de rejet », note-t-on. L'enjeu européen du scrutin est plus considérable encore. « Celui qui peut sauver le président, ce n'est pas Manuel Valls mais Martin Schulz », relève un député de renom, expliquant : « Le seul vrai sujet du quinquennat, c'est l'orientation européenne. Si la gauche l'emporte au Parlement européen, toutes les cartes sont rebattues et François Hollande est remis au centre du jeu. »

A l'inverse, une victoire de la droite, représentée par le Parti populaire européen, pourrait ruiner tous ses espoirs. « Il s'agit de choisir entre une Europe de droite qui a échoué et une Europe de gauche qui est la seule capable de relancer le projet européen », a insisté Manuel Valls à Barcelone, mercredi soir. L'argument vise évidemment, au passage, à détourner les électeurs du vote sanction. D'autant qu'il n'y aura cette fois, a pris soin d'ajouter le chef du gouvernement, « pas de changement de gouvernement », ni de « ligne économique ».