Le projet de texte publié jeudi matin par la présidence azerbaïdjanaise de la conférence de l'ONU étale les divisions et ne satisfait personne.
"Il est clairement inacceptable en l'état actuel des choses", a tonné le commissaire européen Wopke Hoekstra. Lui et ses collègues européens exigent davantage d'engagements pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, face aux pays producteurs de pétrole qui freinent, comme l'Arabie saoudite.
A la sortie de la réunion de coordination des ministres de l'Union européenne jeudi matin, le ministre irlandais Eamon Ryan confie cependant à l'AFP que "cela avance, il est évident que ce texte n'est pas final. Ce sera radicalement différent, il y a de l'espace pour un accord".
L'UE est au centre du jeu à la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP29), en tant que premier contributeur mondial à la finance climatique, et grâce aux lignes de communication qu'elle entretient avec à la fois la Chine et les pays vulnérables, notamment les petits Etats insulaires.
Un texte provisoire de 10 pages a été publié par la présidence au petit matin, tentant de résumer les positions sur le nouvel objectif d'aide financière que la conférence est censée fixer. Et force est de constater qu'elles sont encore très éloignées, du moins sur le papier.
Le texte n'indique que des "X" à la place des montants, même si ceux-ci s'expriment en "milliers de milliards".
"Le texte caricature les positions des pays développés et en développement", estime Joe Thwaites, de l'ONG NRDC. "La présidence doit proposer une troisième option pour les concilier."
Cette troisième option secrète a été mise sur la table par l'Australien Chris Bowen et l'Égyptienne Yasmine Fouad, les deux ministres chargés de rapprocher les positions du Nord et du Sud, mais n'a pas encore été dévoilée aux pays et la présidence la garde dans sa manche, ont confirmé à l'AFP deux sources proches des négociations.
L'absence de chiffrage pour les pays riches "est une insulte aux millions de gens sur le front du changement climatique", a réagi Jasper Inventor, chef de la délégation de Greenpeace International à Bakou.
Le Kényan Ali Mohamed, qui représente les pays africains, insiste sur cette absence de chiffrage: "Nous avons besoin que les pays développés s'engagent urgemment sur ce point."
Mais aux COP, personne ne dévoile ses vraies lignes rouges jusqu'au dernier jour.
Les pays développés fournissent aujourd'hui une centaine de milliards de dollars d'aide financière aux pays en développement pour qu'ils s'adaptent au changement climatique et investissent dans les énergies bas carbone. La COP29 doit fixer un nouvel objectif d'aide jusqu'à 2030 ou 2035.
La conférence doit se terminer vendredi soir, mais des délégués craignent déjà un dépassement jusqu'à samedi.
- Des milliers de milliards -
La première option du texte publié jeudi reflète les exigences des pays en développement. Sans s'avancer sur un chiffre précis, elle demande que "X" milliers de milliards de dollars par an soient fournis par l'argent public des pays riches actuellement obligés de contribuer selon les textes onusiens - essentiellement Europe, Etats-Unis et Japon - et par des fonds privés associés, "sur la période 2025-2035".
Soit bien plus que les 100 milliards que les pays riches s'étaient engagés à fournir sur la période 2020-2025. Une option irréaliste pour les pays riches, a fortiori en période de resserrement budgétaire.
Surtout que cette option ne prévoit aucun élargissement de la liste des contributeurs à des pays comme la Chine, Singapour ou le Qatar.
La deuxième option résume le point de vue des pays riches: l'objectif financier serait "une augmentation de la finance mondiale pour l'action climatique" à "X" milliers de milliards de dollars par an "d'ici 2035", sans préciser la part des pays développés.
L'initiative revient désormais à la présidence azerbaïdjanaise de la conférence.
Il faudra qu'elle trouve le bon d'équilibre pour soumettre aux près de 200 pays de la COP un texte acceptable, et qui permette à chacun de rentrer chez soi "avec un niveau égal de mécontentement", selon les mots à l'AFP du négociateur en chef azerbaïdjanais, Ialtchine Rafiev.