C'est un renversement de tendance. Fiscalisée depuis le 1er janvier 2024, la prime de partage de la valeur séduit beaucoup moins les entreprises françaises. Les versements de cette prime exceptionnelle ont diminué de plus de moitié au premier trimestre 2024, par rapport à la même période de l'an passé, a indiqué l'Insee mercredi. Plus précisément, le montant versé aux salariés est tombé à 490 millions d'euros au cours des trois premiers mois de l'année, contre 1,2 milliard un an plus tôt sur la même période et 2,3 milliards au dernier trimestre 2023.

Conçu comme un moyen de répondre aux inquiétudes des Français pour leur pouvoir d'achat pendant la crise des « gilets jaunes », ce dispositif optionnel a été plébiscité par les employeurs au moment des négociations annuelles obligatoires (NAO) sur les rémunérations ces dernières années, alors que l'inflation s'envolait. En 2023, l'ancienne « prime Macron » a été versée à près de 6 millions de salariés pour un montant moyen de 885 euros, selon l'Urssaf.

Mais en début d'année, les règles ont changé. En 2024, l'exonération des cotisations sociales est maintenue mais elle n'inclut plus, comme en 2022 et 2023, la CSG et de la CRDS. Autre évolution : alors que la prime était jusque-là exonérée d'impôt sur le revenu pour les salariés gagnant jusqu'à trois fois le SMIC, cet avantage n'est maintenu qu'à certaines conditions : affecter sa prime à un plan d'épargne ou travailler dans une entreprise de moins de 50 salariés tout en gagnant moins de trois fois le SMIC.

Hausse des salaires

Les entreprises ont anticipé ces modifications. Une étude la Banque de France montre que fin 2023, moins de 30 % des accords issus des NAO mentionnaient le versement d'une PPV, alors que 40 % en prévoyaient une un an plus tôt.En attendant, la moindre utilisation de cette prime exceptionnelle a pesé sur les salaires horaires dans les secteurs marchands non agricoles. Ces derniers ont progressé de 2,8 % sur un an au premier trimestre 2024, contre 3,1 % au cours des trois mois précédents, a indiqué l'Institut de la statistique. Sur la période, la hausse atteint 3,1 % dans l'industrie, 2,7 % dans le tertiaire et 2,1 % dans la construction.

« Il se peut qu'avec le retour de leur fiscalisation depuis le début de l'année, les entreprises choisissent de faire un peu plus de hausse de salaires mais moins de primes », estimait dans une récente interview aux « Echos » Eric Heyer, économiste à l'OFCE. Au premier trimestre, le coût du travail horaire a, lui, augmenté de 3 %.