Cinq ans après le début de la crise financière, le rétablissement des comptes publics de la zone euro s'est concrétisé hier par un double symbole. Premièrement, la zone euro s'est à nouveau arrimée, pour la première fois depuis 2008 à la sacro-sainte limite des 3 % de PIB fixée par les traités, alors que le déficit public moyen de la zone euro avait culminé à 6,4 % en 2009. Deuxièmement, la Grèce, épicentre de la crise de la zone euro à partir de la fin 2009, a dégagé l'an dernier un excédent dit « primaire » de 0,8 % de son PIB. Ce qui signifie que si l'on exclut la charge de ses remboursements de dette, elle n'a plus besoin d'emprunter pour faire fonctionner son administration et peut commencer à se désendetter.Ces deux victoires ont pour beaucoup un goût amer tant les sacrifices, réclamés aux Européens pour assainir des budget dégradés, ont été douloureux surtout dans les pays du Sud, mais les gouvernements envoient le signal que la zone euro a tenu bon et qu'elle respecte à nouveau ses engagements budgétaires. Pas d'euphorie cependant. Derrière ce début de recadrage général se cachent de grandes disparités. Entre le Luxembourg, le seul à dégager un excédent de ses comptes publics (0,1 % de son PIB) et la Slovaquie qui traîne du fait de la recapitalisation massive de ses banques un déficit public de 14,7 %, on cherche en vain les points communs. Entre les « grands » toutefois, l'écart se resserre. Si l'Allemagne a décroché le Graal de l'équilibre budgétaire parfait en 2013, la France est revenue à 4,3 % contre 4,9 % en 2012, et l'Italie s'est stabilisée à 3 %. L'Espagne qui affichait en 2012 un déficit de 10,6 %, l'a ramené à 7,1 % l'an dernier.

11.383 milliards de dette

Au total, fin 2013, onze pays de la zone euro sur dix-huit étaient revenus dans les clous de Maastricht et affichaient un déficit public inférieur à 3 %. Là encore, l'amélioration a ses limites. Car derrière les déficits publics se cachent les dettes. Et de ce point de vue, les chiffres publiés hier par Eurostat sont moins rassurants. Au total, la zone euro cumulait fin 2013, 11.383 milliards d'euros de dette, soit 92,6 % de son PIB, très au-delà des 60 % du PIB autorisés par le traité de Maastricht et surtout en hausse par rapport à 2012 (90,7 %). A la fin de 2013, treize Etats membres de la zone euro sur dix-huit avaient une dette supérieure à ce seuil. Certains le dépassaient même allégrement, tels la Grèce (175 % de son PIB), l'Italie (132,6 %), le Portugal (129 %) et Chypre (111 %). A l'autre extrémité de l'échelle, l'Estonie n'affichait qu'un endettement public de 10 % et le Luxembourg de 23 %.Certains dirigeants politiques pensent que le calme revenu sur les marchés financiers et l'appétit retrouvé des investisseurs pour les dettes souveraines grecques et espagnoles les dispensent de maintenir une discipline de fer sur leurs comptes publics. C'est sans compter leurs propres engagements que la Commission européenne ne manquera pas de leur rappeler, l'heure venue. Les pays qui ont une dette supérieure à 60 % du PIB feront l'objet de sanctions s'ils ne réduisent pas d'un vingtième par an l'écart entre leur taux d'endettement et les fameux 60 %. « Jusqu'ici la Commission européenne, concentrée sur les déficits, a fermé les yeux sur la dette et les marchés se montrent bienveillants, note Thibault Mercier, économiste à BNP Paribas. Mais pour combien de temps ? »