La Commission européenne qui publiait hier ses recommandations annuelles de politique économique pour chaque pays de l'Union, a émis des doutes sur la capacité de la France à ramener son déficit budgétaire sous la barre de 3 % du PIB en 2015 comme promis. Elle a néanmoins salué ses efforts. « Efforts encourageants, doit persévérer, peut mieux faire », tel est en substance le message adressé à Paris. Au grand soulagement du ministre des Finances, Michel Sapin, qui « note avec satisfaction que la Commission valide les orientations économiques présentées par le gouvernement français ». Hier, ni le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, ni le commissaire aux Affaires économiques, Olli Rehn, n'ont adressé le moindre reproche à Paris. En dépit de leurs doutes : « Le niveau de détail des mesures d'assainissement budgétaire est insuffisant pour garantir de façon crédible la correction du déficit excessif pour 2015 au plus tard, comme le laisse entrevoir la prévision de déficit annoncée par la Commission pour l'année prochaine (3,4 % du PIB) », écrit l'exécutif bruxellois. Mais il n'est question ni de sanctions ni même de remontrances, mais de mesures qui vont « dans la bonne direction ». Olli Rehn explique juste que l'Europe prévoit pour la France une croissance moins élevée que Bercy (1,5 % au lieu de 1,7 %) et qu'à ce stade, les mesures d'économies promises pour 2015 sont insuffisantes. La Commission européenne ne trouve en effet que 17,5 milliards d'économies sur les 21 milliards annoncés par Paris.

Un système éducatif très inégalitaire

Mais Bruxelles veut laisser à la France le bénéfice du doute, en expliquant que Paris avait dû relever très fortement ses impôts dans un premier temps pour parer au plus pressé, et avait en quelque sorte raté la marche des économies. « Or trop d'impôts sans baisse importante de dépenses risque de freiner la croissance », a souligné Olli Rehn.José Manuel Barroso a nié tout lien entre la clémence européenne à l'égard de l'Hexagone et la montée du vote extrémiste aux élections européennes. « Les autorités françaises ont annoncé bien avant les élections un paquet de mesures structurelles et nous pensons que si ces mesures sont bien appliquées, les objectifs de réduction de déficit ne sont pas hors d'atteinte », a-t-il déclaré.Dans le détail des recommandations, le constat dressé n'est toutefois pas rose : coût du travail trop élevé, charge fiscale supérieure à celle de nos voisins, réforme des retraites insuffisante, dépenses de santé insuffisamment maîtrisées... Pour la première fois, la Commission rappelle aussi à la France qu'elle a l'un des systèmes éducatifs parmi les plus inégalitaires du monde !Mais cette fois-ci, Bruxelles ne veut pas ajouter de la crise à la crise. Alors qu'il y a un an, François Hollande avait accusé la Commission de vouloir « dicter sa politique à la France », celle-ci veut éviter toute polémique qui pourrait encore bénéficier aux partis extrémistes. D'autant plus que la reprise est là dans pratiquement toute l'Union et qu'elle a eu le plaisir d'annoncer hier la sortie de six pays de la procédure de déficit excessif, c'est-à-dire d'une surveillance budgétaire rapprochée : l'Autriche, la Belgique, la République tchèque, le Danemark, la Slovaquie et les Pays-Bas. Pour la France, une telle issue paraît bien lointaine.