Pas de légère récession cet hiver, comme le craignent le Medef et certains économistes, mais une croissance qui diminue et restera encore faible l'an prochain. C'est le scenario présenté ce lundi par la Banque de France dans ses nouvelles prévisions pour 2024-2027. Selon les dernières projections de l'institution, la France enregistrerait une croissance du PIB de 0,9 % l'an prochain, après 1,1 % cette année. Cette prévision est donc revue à la baisse par rapport à septembre dernier, lorsque la Banque de France anticipait une croissance de 1,2 % en 2025. Désormais,
« la reprise serait décalée de 2025 à 2026 », veut croire la Banque de France. Si toute prévision comporte son lot de risques et d'incertitudes, le contexte politique et budgétaire actuel rend l'exercice particulièrement délicat. Les projections de la Banque de France ont été arrêtées avant la censure du gouvernement Barnier et se fondent sur un projet de budget pour 2025 désormais caduc.
« De ce fait, les aléas sont orientés à la baisse sur la croissance française, avec le risque de comportements plus attentistes des consommateurs et des investisseurs », prend soin de préciser Olivier Garnier, le chef économiste de l'institution.
Incertitude accrue
Mais alors que l'agence de notation Moody's a baissé, vendredi soir, la note de la France - afin de prendre acte de la censure et s'inquiétant de la difficulté du gouvernement à redresser significativement les comptes publics dans le contexte politique actuel -, la Banque de France met en garde : « Une moindre consolidation budgétaire n'entraînerait pas pour autant un surplus de croissance, car l'effet négatif de l'incertitude accrue sur la demande des ménages et des entreprises jouerait en sens opposé », indique l'institution.
Fondant ses hypothèses sur un déficit ramené entre 5 % et 5,5 % du PIB l'an prochain (là où le gouvernement Barnier tablait initialement sur 5,1 %),
« nos projections montrent qu'il y a un sentier possible conciliant réduction du déficit et croissance », poursuit Olivier Garnier. Pas de scénario apocalyptique pour 2025 donc, mais une économie qui continuerait à croître à un rythme
« assez faible », de l'ordre d'un quart de point par trimestre. Malgré le reflux de l'inflation (1,6 %) et les gains de pouvoir d'achat, la consommation resterait modérée (+0,9 % en 2025, après +0,8 % l'an dernier), affectée par les mesures de réduction du déficit et l'incertitude politique. La situation de l'emploi serait moins bonne qu'anticipé en septembre. L'économie française détruirait 40.000 emplois en 2025, après 128.000 créations nettes cette année.
« Des facteurs positifs »
Affecté par le ralentissement de l'activité et par le rétablissement partiel des pertes de productivité observées pendant le Covid (les entreprises ont retenu plus d'emplois qu'elles n'en avaient réellement besoin), le marché de l'emploi connaîtrait un trou d'air avant de se redresser en 2026. De ce fait, le taux de chômage atteindrait un pic à 7,8 % en moyenne en 2025 et 2026 (contre 7,4 % cette année),
« avant de repartir à la baisse ». De son côté, l'investissement des entreprises continuerait à marquer le pas (-0,2 % l'an prochain),
« pénalisé notamment par l'incertitude fiscale et budgétaire ». La Banque de France n'anticipe plus de redémarrage avant, au mieux, l'été prochain, compte tenu de l'attentisme actuel des milieux d'affaires.
« Mais il demeure des facteurs positifs, comme le taux de marge des entreprises qui a été préservé, le desserrement de la politique monétaire, et encore les besoins tendanciels d'investissement dans les transitions numérique et énergétique », ajoute encore Olivier Garnier.Pour finir, la Banque de France table toujours sur une sortie de l'inflation sans récession mais
« avec une reprise décalée à 2026 et 2027 » et une hausse du PIB de 1,3 % ces deux années
. « La France est à l'arrêt depuis maintenant quasiment un an. On a eu quatre Premiers ministres qui se sont succédé. On a les agents économiques qui sont à l'arrêt, qui attendent de savoir s'ils vont investir. On a vraisemblablement un risque de restructuration importante pour nombre d'entreprises […] Il faut un gouvernement », a alerté ce lundi l'ex-commissaire européen Thierry Breton sur BFMTV/RMC. L'Insee dévoile, mardi, ses propres prévisions pour les six mois à venir.