Un gros ouf de soulagement. Le patronat, CPME en tête, a accueilli jeudi favorablement l'avis du Conseil d'Etat publié mercredi portant sur « la mise en conformité du Code du travail en matière d'acquisition de congés pendant les périodes d'arrêt maladie ».

Derrière cet intitulé assez simple se joue une partie de droit à fort enjeu depuis un arrêt de la Cour de cassation qui a fait craindre aux entreprises de devoir provisionner des centaines de millions, le Medef évaluant même la facture à au moins 2 milliards !

S'appuyant sur plusieurs décisions de la Cour de justice de l'Union européenne et sur la Charte européenne des droits fondamentaux de 2009, la Cour de cassation a statué mi-septembre que le Code du travail n'était pas conforme, en cela qu'il ne reconnaissait pas aux salariés en arrêt maladie des droits à congés payés. Ce, même si l'absence qui en a découlé est due à une maladie d'origine non professionnelle.

Amortir le choc

Le risque juridique court, en fait, depuis 1996, année de révision de la Charte sociale européenne, mais les gouvernements successifs ont pratiqué la politique de l'autruche. En 2016, une disposition a bien été intégrée dans une toute première version de travail de la loi El Khomri, pour être retirée par la suite. Acculé par la plus haute juridiction civile, le gouvernement Borne n'avait plus le choix que de mettre le Code du travail d'équerre tout en cherchant à amortir le choc pour les entreprises, conforté en partie par un récent avis du Conseil constitutionnel.

L'avis, très complexe, du Conseil d'Etat au projet d'amendement au projet de loi d'adaptations diverses au droit européen, qui doit être examiné à l'Assemblée à partir de lundi, reprend en partie ce que l'exécutif visait. Le point le plus important porte sur le passif potentiel, c'est-à-dire des cas de salariés ayant connu des périodes de maladie il y a des années de cela.

Pour la période de 1996 à 2009, date d'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, les employeurs sont exonérés. Au salarié ou à l'ex-salarié de se retourner vers l'Etat. Pour les arrêts maladie intervenus depuis 2009, deux cas de figure ressortent. Primo le salarié a quitté l'entreprise depuis son arrêt maladie. Il peut alors se retourner vers son ex-employeur pour obtenir des indemnités de congé payé, à raison de 2 jours par mois (4 semaines par an) et non pas 2,5 jours (5 semaines), mais dans une limite rétroactive des trois dernières années passées chez cet employeur. En clair, tout arrêt maladie antérieur ne comptera plus.

« Une absurdité corrigée »

Si, secundo, le salarié est toujours dans l'entreprise, alors la rétroactivité est limitée à deux années, « à compter de l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions législatives ». Par exemple, dans le cas d'un salarié qui reprendrait le travail aujourd'hui, il n'obtiendrait rien au titre d'arrêts maladie antérieurs à mars 2022. Qui plus est, le Conseil d'Etat fixe à quinze mois le délai pour prendre ses congés, ce qui est assez restrictif et constitue un point clé selon le patronat. « Notre travail, mené de concert avec le gouvernement a porté ses fruits », s'est félicité dans un message sur le réseau social X le président du Medef, Patrick Martin. Son homologue de la CPME, François Asselin, a estimé sur le même réseau qu'« une absurdité vient enfin d'être corrigée ».