Le très net reflux de l'inflation (retombée à 1,1 % en septembre sur un an, selon l'Insee) est une bonne nouvelle pour le pouvoir d'achat des Français. Grâce à cette désinflation plus rapide que prévu, les salaires réels auront récupéré, d'ici à fin 2024 environ, la moitié des pertes subies durant l'épisode inflationniste, prévoit l'Institut de la statistique dans ses dernières prévisions d'octobre. Et de tabler sur une hausse de 1,4 % du salaire mensuel de base réel à fin 2024, après un recul de 3 % entre fin 2020 et fin 2023.

De fait, le choc inflationniste a pesé sur le pouvoir d'achat des salaires ces dernières années. En 2023 encore, l'augmentation des salaires est restée inférieure à la hausse des prix, indique l'Insee dans une nouvelle étude publiée mercredi. Un salarié du secteur privé gagnait en moyenne 2.735 euros net par mois (en équivalent temps plein) l'an dernier. La hausse a été importante (+4 % sur un an), mais insuffisante pour compenser totalement la flambée des prix (+4,9 %). Si bien que le salaire net moyen a diminué de 0,8 % en euros constants en 2023.

Réduction des inégalités

Il s'agit de la deuxième année consécutive de baisse : en 2022, année de forte inflation également (+5,2 %), le salaire net moyen avait diminué de 1 %. « Au total, le pouvoir d'achat du salaire net moyen est égal en 2023 à son niveau de 2019 », indique l'Institut de la statistique.Le décalage n'est pas très surprenant. En période d'inflation, les salaires ont tendance à suivre avec retard les hausses de prix, du fait des négociations dans les entreprises. Les revalorisations du SMIC à hauteur de l'inflation étant, elles, automatiques, le pouvoir d'achat des salariés en bas de l'échelle (inférieur à 1.671 euros net par mois) a mieux résisté, affichant une très légère progression. Au-delà, le pouvoir d'achat a reculé, avec une baisse d'autant plus forte que l'on monte dans l'échelle salariale. Résultat, « les inégalités salariales ont continué de diminuer », note l'Insee.Les inégalités baissent mais les disparités restent fortes, si l'on porte le regard au-delà du salaire moyen. Un salarié sur deux gagne moins de 2.183 euros net par mois. Ce niveau de salaire médian est nettement inférieur au salaire moyen, ce qui démontre bien la forte concentration des salaires dans le bas de l'échelle.

Trappe à bas salaires

Une problématique de « trappe à bas salaires » est au coeur du récent rapport des économistes Antoine Bozio et Etienne Wasmer. Ces derniers proposent de revoir le mécanisme d'allègement des charges pour faciliter les augmentations. « Un salarié sur dix gagne moins de 1.512 euros net par mois, alors qu'un sur dix perçoit plus de 4.302 euros », constate l'Insee. Tout en haut de l'échelle, 1 % des salariés gagnent plus de 10.222 euros net par mois, soit près de 7,4 fois le SMIC.

Un écart important entre hommes et femmes

En tenant compte de la hausse des prix, le salaire net moyen des cadres a davantage baissé (-2,8 %) que celui des ouvriers ou des employés (-0,3 % et -0,5 % respectivement). Ces derniers étant plus présents dans le bas de l'échelle salariale, ils ont bénéficié de la revalorisation du SMIC.L'écart de salaire entre femmes et hommes reste important mais « continue de se réduire », observe également l'Insee. Avec un salaire de 2.508 euros net par mois, les femmes gagnent en moyenne 13,5 % de moins que les hommes. « Cet écart s'est réduit de 0,5 point par rapport à 2022 et de 7,4 points depuis 2008 », poursuit l'Institut de la statistique.Cette réduction tient, en partie, au fait que les femmes sont davantage représentées dans le bas de l'échelle des salaires où le pouvoir d'achat a le mieux résisté. A l'autre bout de l'échelle, « elles ne représentent que 23,5 % des 1 % des salariés les mieux rémunérés, contre 41,9 % de l'ensemble des salariés du privé », relève l'Insee.