Quel qu'il soit, il ne fait aucun doute que le nouvel homme fort de Bercy filera très vite à Bruxelles défendre le cap économique de la France. Paris a moins de deux semaines pour boucler son programme de stabilité fixant une nouvelle trajectoire de retour à l'équilibre des finances publiques ainsi que les réformes et les économies pour y arriver.D'ici là, les discussions promettent d'être intenses avec la Commission. Et pour cause : en demandant à mi-mot, lundi soir, un nouveau délai pour réduire le déficit, François Hollande prend le contre-pied de Bruxelles. La Commission avait, début mars, placé la France sous surveillance renforcée, lui demandant des mesures d'urgence pour éviter un dérapage du déficit. Le gouvernement Valls mettra en oeuvre le programme de 50 milliards d'économies annoncé, a confirmé le chef de l'Etat. Le ministre du Budget sortant, Bernard Cazeneuve, a remis sa copie à l'Elysée à la veille du second tour. Le plan est quasi finalisé et Bercy a promis que ces économies seraient détaillées. Pour répondre aux exigences de Bruxelles et crédibiliser son message de maîtrise des dépenses publiques, pas question de se limiter à de grandes masses (Etat, opérateurs, collectivités locales et Sécurité sociale). L'une des pistes à l'étude serait que certaines mesures du plan aient un effet dès cette année.Mais « il ne s'agit pas de faire des économies pour des économies », a prévenu le chef de l'Etat. Paris compte donc insister sur son pacte de responsabilité et ses 10 milliards de baisses de charges pour les entreprises. En cela, Paris pourra faire valoir qu'il a entendu le message de Bruxelles qui s'inquiète de la dégradation de la compétitivité des entreprises.Reste l'épineuse question du financement. En ajoutant la promesse d'une baisse des impôts pour les ménages conjuguée à une baisse des cotisations salariales (une enveloppe de 2 à 3 milliards était évoquée avant le second tour des municipales) sans compter la réduction de la fiscalité des entreprises (5 à 8 milliards d'euros), l'addition grimpe vite. Mises bout-à-bout, toutes ces mesures feront grimper le déficit largement au-dessus des 3 % en 2015. Ce n'est donc pas un hasard si le chef de l'Etat est resté très discret sur le calendrier et sur le montant de ces mesures. Tout cela va faire l'objet d'âpres négociations avec Bruxelles. Paris est conscient que la marge de manoeuvre est étroite après le délai de deux ans obtenu l'an dernier pour revenir à 3 %. « Faire plus que les 50 milliards d'euros d'économies serait bruxello-compatible mais mortifère pour l'économie, estime Eric Heyer, économiste à l'OFCE. Paris doit convaincre Bruxelles que ses pactes de responsabilité et de solidarité sont bons pour la croissance, donc pour les recettes fiscales et que ces mesures seront au final en partie autofinancées. »