Deux magistrates instructrices de la Juridiction nationale de lutte contre le crime organisé (Junalco) ont ordonné ce renvoi jeudi dernier, a appris l'AFP mardi de sources proches du dossier.
Ces Philippins, âgés de 30 à 55 ans, sont soupçonnés d'avoir importé et transporté de la cocaïne et d'avoir participé à une entente en vue de ce trafic de stupéfiants.
Le 1er août, le parquet de Paris avait requis un procès pour ces 13 Philippins.
- Faux plafond -
Le 1er octobre 2021, plus d'une tonne de cocaïne avait été retrouvée dans le faux plafond de la salle de sport de ce vraquier voguant dans la Manche et immobilisé par les autorités.
Dix jours plus tard, un commando armé avait fait irruption sur le cargo, alors à quai à Dunkerque, manifestement à la recherche de la cargaison restante.
Le bateau avait ensuite repris la mer jusqu'à Rotterdam (Pays-Bas): là, une nouvelle fouille des enquêteurs néerlandais le 26 octobre 2021 avait mis au jour 520 kilos supplémentaires, cachés sous de la magnésie.
Il est apparu au cours de l'enquête qu'au total, 3,6 tonnes de cocaïne ont été chargées sur le navire Trudy, dont 2,5 tonnes déchargées sur sa route, selon l'ordonnance de mise en accusation dont l'AFP a eu connaissance mardi.
La valeur de la marchandise est estimée à "plusieurs millions d'euros", précise le document.
- Photographies incriminantes -
La cocaïne, qui provenait du Pérou, présentait "un taux de pureté particulièrement élevé", avait indiqué le parquet dans son réquisitoire définitif que l'AFP avait pu consulter en août.
Cette opération a "induit nécessairement une logistique que seule une organisation criminelle de grande ampleur est capable de mettre en œuvre" avec "l'implication d'un nombre très important de personnes", ont souligné les juges d'instruction.
Le chargement, au Brésil, et le stockage de ces 3,6 tonnes de cocaïne sur le Trudy "n'a été possible que par la légèreté, voire l'incompétence" du capitaine roumain et de son premier officier russe, notent-elles.
Cependant, aucune connaissance ou participation au trafic n'a pu être retenue contre eux.
Les juges ont donc décidé d'un non-lieu en leur faveur, comme pour cinq autres membres de l'équipage, suivant ainsi les réquisitions du parquet.
Initialement, 20 personnes avaient été mises en examen en 2021 dans ce dossier.
"Mon client, ingénieur-mécanicien sur ce navire, avait été incarcéré avec l'intégralité de l'équipage sans distinction aucune. La justice a enfin reconnu son innocence", s'est félicité auprès de l'AFP Me Julien Fresnault, avocat d'un ressortissant russe qui sollicitera "naturellement l'indemnisation de cette détention injustifiée".
Selon les juges, "c'est surtout l'exploitation des téléphones et supports numériques saisis sur les marins et dans leurs cabines qui a permis d'accélérer l'enquête", aux ramifications internationales.
Des photographies ont notamment été retrouvées, montrant au total "sept marins manipulant tout sourire des sacs de cocaïne". Sur d'autres photos, qui "ont circulé entre des membres de l'équipage", on voit "de très fortes sommes d'argent philippin, attestant de juteuses rétributions ou promesses de rétribution dont ont bénéficié les membres de l'équipage" du navire, qui devait se rendre à Anvers, en Belgique.
"Après quatre années de détention provisoire isolé à des milliers de kilomètres des siens, mon client n'espère plus qu'une chose: être entendu et équitablement jugé pour que ce cauchemar prenne fin", a déclaré de son côté à l'AFP Me Fares Aidel Sehili, conseil d'un agent d'entretien philippin.