"Je vous aime!", a lancé de sa voix toujours grinçante le charismatique chanteur à la foule, qui l'a soutenu à chaque seconde de ce "last show", qu’il a voulu dans sa ville, entouré des plus grandes stars du metal.

A 76 ans, le "Prince des ténèbres" -- son surnom -- souffre depuis plusieurs années de la maladie de Parkinson.

Celui qui a écrit sa légende en croquant la tête d'une chauve-souris vivante en plein concert, a chanté assis, prisonnier de ses tremblements, dans un trône satanique confectionné à son attention, les yeux rougis cerclés de noir.

Un adieu brut et émouvant, en compagnie de ses acolytes de Black Sabbath, devant des dizaines de milliers de fans de metal, venus du monde entier pour communier avec lui dans le stade du club de football d'Aston Villa, aux airs de cathédrale païenne.

"Il pouvait voir notre soutien et c'est ce qui m'a fait pleurer", raconte Lilly Chapman, 29 ans, encore émue d'avoir vu le "Parrain du metal", un autre de ses surnoms, "se montrer vulnérable devant des milliers de personnes".

- "Une fois dans la vie" -

Black Sabbath, pionnier du heavy metal, ne s'était plus réuni dans sa formation originelle de 1968 -— Ozzy Osbourne au chant, Tony lommi à la guitare, Geezer Butler à la basse et Bill Ward à la batterie -— depuis 20 ans.

Un plateau ébouriffant avait été convoqué pour l’occasion: Metallica, Guns N'Roses, Pantera, Slayer, les Français de Gojira, sans oublier Tom Morello de Rage Against The Machine, Steven Tyler d’Aerosmith, Ron Wood des Rolling Stones ou Billy Corgan des Smashing Pumpkins.

A chaque passage, les spectateurs ont repris en coeur ces hymnes qu’ils connaissent si bien, secouant la tête à l'unisson, dans une ambiance à faire pâlir les supporters des "Villains", habituels occupants des lieux.

Chacun avait revêtu son T-shirt metal de circonstance, Black Sabbath l'emportant largement. Cheveux longs, barbes épaisses et tatouages surdimensionnés ont dominé les débats.

"Ça n'arrive qu'une fois dans la vie", s'enthousiasme Rich Newlove, venu du nord de l'Angleterre, qui sirote une bière en se remémorant les dernières heures.

Ozzy "était en meilleure forme et meilleure santé que ce à quoi je m'attendais", dit-il, confessant un sentiment "doux amer" à l'idée de l'avoir vu pour la première et dernière fois.

Certains sont venus de loin, à l'image de Jared Higginbotham, mince barbu de 34 ans débarqué d'Austin, au Texas, avec sa compagne Janice Attal, 50 ans, pour ce qu'ils considèrent comme "le plus grand concert de metal de tous les temps". 

Eux ont suivi le show de la pelouse. D'autres, plus malchanceux, se sont consolés à l’extérieur de l’enceinte.

- 415 livres la place -

Car malgré des tarifs très élevés, les billets pour l'événement, organisé au lendemain du premier concert de reformation d'Oasis à Cardiff (pays de Galles), se sont arrachés en à peine 16 minutes. Les fonds seront reversés à des organisations caritatives.

Henry Broderick, un éboueur de 22 ans venu des environs de Cambridge avec un copain, dit avoir déboursé 415 livres pour sa place car "c'est tout ce qui restait".

Le prix à payer pour assister à la dernière d’Ozzy, icône déjantée, aussi célèbre pour ses frasques que pour son émission de téléréalité familiale dans les années 2000, "The Osbournes", un des plus grands succès de MTV, qui lui a permis de toucher un nouveau public.

Son groupe, Black Sabbath, a vendu plus de 75 millions d'albums dans le monde, avec en point d'orgue des ventes tubes comme "Paranoid", "War Pigs" ou "Iron Man".

Il est considéré comme le créateur du heavy metal, mélange de rock et de blues aux sonorités lourdes et aux paroles sombres. Un genre longtemps honni mais immensément populaire aujourd’hui.