Bercy profite des dernières heures de 2024 pour lever le voile sur une partie de ses intentions budgétaires. Dans un communiqué envoyé le 31 décembre dans l'après-midi, le ministère de l'Economie et des Finances apporte une longue liste de précisions « quant aux positions que le gouvernement entend défendre devant le Parlement lors de l'examen à venir de la loi de finances pour 2025 ». Le timing ne doit rien au hasard. Une annonce dès 2024 doit permettre d'éviter à certaines mesures fiscales, qui seraient votées en 2025, d'être rendues inapplicables par les règles qui encadrent la rétroactivité des impôts et exonérations. « L'objectif est d'apporter des précisions sur des situations qu'il serait, juridiquement ou opérationnellement, impossible de traiter rétroactivement par le PLF promulgué après le 1er janvier sans annonce préalable du gouvernement et qui, faute de prévisibilité, pourraient perturber les transactions du début de l'année », confirme le communiqué de Bercy.

En raison de l'absence de budget voté avant le 31 décembre 2024, de nombreux dispositifs fiscaux risquaient en effet de s'éteindre dès minuit au soir de la Saint-Sylvestre. C'est pour éviter cet écueil que l'exécutif a pris les devants, en abattant une partie de ses cartes pour prévenir dès maintenant les contribuables de ses orientations quant au futur PLF, dont le Premier ministre espère l'adoption vers la mi-février. Sauf modification au cours du débat parlementaire, le futur PLF devrait ainsi permettre le maintien de nombreux dispositifs d'aides, qui semblaient sur le gril. Encore faudra-t-il in fine que le budget soit voté…

Immobilier et environnement

Le gouvernement indique vouloir soutenir, avec une entrée en vigueur au 1er janvier 2025, la reconduction à l'identique de nombreuses niches fiscales, adoptées par le Sénat en première lecture du PLF 2025. Parmi elles, certaines concernent l'immobilier, comme la réduction d'impôt « Loc'Avantages », qui permet jusqu'ici aux propriétaires de bénéficier d'une réduction d'impôt, s'ils proposent un loyer inférieur à ceux du marché à leurs locataires.

D'autres, relatives au soutien à l'environnement, seraient aussi préservées, comme le crédit d'impôt aux agriculteurs qui obtiennent le label haute valeur environnementale (HVE) ou le suramortissement pour les navires verts, censé permettre le renouvellement de la flotte des armateurs français.

Soutien aux entreprises

L'essentiel des mesures que le gouvernement souhaite préserver visent à soutenir les entreprises, comme le crédit d'impôt innovation (CII), qui permet aux compagnies de moins de 250 personnes de déduire de leur impôt sur les sociétés 30 % de leurs dépenses liées à la « conception de prototypes ou d'installation pilote de produits nouveaux ». L'exécutif souhaite le reconduire, mais ramener le taux à 20 %. Egalement potentiellement sauvé, le crédit d'impôt collection (CIC), qui permet aux entreprises du textile et de l'habillement de déduire 30 % des dépenses de conception et réalisation de nouvelles collections.

L'exonération d'impôt sur les sociétés sur les revenus patrimoniaux des établissements scientifiques, d'enseignement et d'assistance, l'abattement sur la plus-value sur l'actif professionnel lors du départ en retraite du chef d'entreprise et la suppression de la réduction d'impôt au titre des dépenses engagées pour la tenue de la comptabilité et l'adhésion à un organisme de gestion agréé (OGA) figurent également dans cette longue liste de niches que Bercy veut maintenir.

Le gouvernement veut aussi préserver, dans le PLF à venir, différents avantages accordés aux entreprises implantées dans des zones soutenues fiscalement (zonage France Revitalisation Rurale, zones franches urbaines, quartiers prioritaires de la ville, bassins d'emploi à redynamiser), en passe de tomber. Enfin, l'exécutif entend prolonger pour un an le bouclier tarifaire pour les industriels électro-intensifs, en soutenant le maintien du tarif à 0,5 euro/MWh pour 2025.

Bercy prévient en revanche les grandes entreprises de son intention de reprendre l'intégration dans la loi des instructions de l'OCDE sur l'imposition minimale du bénéfice des multinationales.

Aide aux agriculteurs

Bercy entend préserver différentes mesures de soutien au monde agricole. Le ministère de l'Economie veut ainsi maintenir le crédit d'impôt au titre des dépenses de remplacement pour congé de certains exploitants agricoles ou encore rétablir les accises sur le gazole non routier agricole au niveau de 2023, pour « annuler la trajectoire haussière figurant dans la loi, conformément à ses engagements ». Le gouvernement souhaite également rendre applicables au 1er janvier différentes mesures fiscales de soutien aux exploitations, dont l'avantage fiscal et social relatif aux stocks de vaches laitières et allaitantes, mais aussi les mesures d'incitation à la transmission des exploitations au profit des jeunes agriculteurs.

Ces avantages fiscaux qui restent menacés

Certaines dispositions fiscales, expirant au soir du réveillon, ne figurent pas dans le communiqué, comme l'exonération de charges sociales pour l'employeur en cas de prise en charge de 75 % des titres de transport, l'exonération d'impôt et de charges sociales sur les pourboires ou encore le crédit d'impôt pour formation des dirigeants.Elles paraissent donc menacées, même si les indications du communiqué « ne correspondent pas à un inventaire exhaustif des mesures dont l'entrée en vigueur aura lieu au 1er janvier », précise Bercy.