"Le Fuji est la bande-son de Lagos. C'est partout. Ce son a donné naissance à l'afrobeats et à tout ce que nous entendons aujourd'hui", confie Adekunle Gold à l'AFP, lors d'une rencontre à Paris.
Descendant de la famille royale Kosoko, le chanteur de 38 ans puise son inspiration dans les traditions yoruba, répandues en Afrique de l'Ouest.
Le Fuji émane de "l'un des sons les plus anciens du Nigeria", retrace-t-il.
Ces sonorités ont accompagné les communautés musulmanes yoruba pendant les festivités du ramadan. Mais c'est le chanteur-compositeur Ayinde Barrister qui baptisa ainsi plus tard son propre style, en référence au célèbre mont japonais.
Tempo élevé, percussions omniprésentes, paroles aux airs de mantra ou de leçons de vie: cette musique a essaimé dès les années 1960, dans un pays qui venait de proclamer son indépendance.
Adekunle Gold mélange ces références traditionnelles avec le groove soul ou R'n'B de son époque. Comme Burna Boy ou Davido, il représente cette génération d'artistes nigérians qui ont construit des ponts entre passé et présent, créant une musique calibrée pour un public international.
"Vous l'écoutez et cela fait bouger votre corps. C'est magique. Le Fuji, le highlife (autre genre musical traditionnel, NDLR), chaque son du Nigeria, de l'Afrique, vous fait vous sentir vivant. Je pense que c'est pour cela que cela fonctionne bien", esquisse Adekunle Gold, en concert à Londres en novembre.
Avec ses tenues aux couleurs chatoyantes, ses chorégraphies et ses pirogues fleuries, le clip de "Party No Dey Stop", un de ses tubes en duo avec son compatriote Zinoleesky, culmine à 29 millions de vues sur YouTube. Cette chanson incarne aussi son premier gros succès aux Etats-Unis.
"AG Baby" - son surnom - a percé dans son pays natal en 2014, en proposant une reprise d'un morceau du groupe anglo-irlandais One Direction. Depuis, il a signé avec le prestigieux label américain Def Jam Recordings et collaboré sur le titre "Falling up" avec la légende funk Nile Rodgers et le musicien, producteur et styliste (Louis Vuitton) Pharrell Williams.
- Diffuser la culture -
Dans ce nouveau disque, Adekunle Gold (9,3 millions d'abonnés sur Instragram) n'aborde pas que des sujets légers. "Je parle de mon chagrin lorsque j'ai perdu mon père. Je parle de ma vie amoureuse, de ma fille et de ma vie de père de famille", explique-t-il, en référence à sa femme Simi, chanteuse également.
"Il y a quelques sujets politiques", glisse l'artiste, qui vit aux Etats-Unis mais dont le "cœur est à Lagos".
"Je diffuse la culture, je parle de mon héritage, de la tradition. Beaucoup plus de gens s'intéressent au Nigeria, grâce à l'afrobeats dans le monde, grâce à notre musique et tout le reste", assure-t-il.
Les défis restent pourtant immenses pour ce pays, où près de 60% des habitants vivent sous le seuil de pauvreté selon la Banque mondiale, et où le nord-est connaît une insurrection sanglante menée depuis 2009 par le groupe jihadiste Boko Haram.
"Il y a eu des mesures qui vont dans la bonne direction", observe Adekunle Gold, optimiste pour l'avenir.
"Soutenez le gouvernement. Parce que ce n'est pas suffisant que le gouvernement fasse tout. Vous devez faire votre devoir de citoyen", appelle l'artiste, qui estime faire "sa part" en menant "une vie exemplaire".
Engagé dans la lutte contre la drépanocytose, une maladie génétique répandue dont il est lui-même porteur, il a lancé cette année une fondation pour financer des soins et soutenir les associations caritatives sur le terrain.