Alors qu'à Téhéran de fortes explosions ont encore retenti dans la nuit, la population israélienne, notamment dans la région de Tel-Aviv, a vécu au rythme des sirènes d'alerte et des appels à se réfugier dans les abris depuis vendredi et le lancement par Téhéran de ses représailles.

L'Iran a affirmé viser des "bases" et des "infrastructures militaires" israéliennes.  

Sur CNN, l'ambassadeur israélien aux Etats-Unis, Yechiel Leiter, a précisé que l'Iran avait lancé "environ 150" missiles balistiques en trois salves depuis vendredi. Les tirs ne devraient pas s'arrêter, a-t-il souligné, la République islamique possédant selon lui un arsenal de près de 2.000 missiles.

Vendredi soir, les pompiers avaient fait état de "plusieurs incidents majeurs" autour de Tel-Aviv. Des images de l'AFP prises dans le centre de la ville côtière ont montré des flammes et de la fumée s'élevant d'un immeuble d'habitation, à la base duquel une explosion a creusé une large ouverture. 

Chen Gabizon, 29 ans, a déclaré à l'AFP avoir couru vers l'abri souterrain de l'immeuble visé après avoir entendu les sirènes. "Quelques minutes après, nous avons entendu une très forte explosion, tout tremblait: fumée, poussière, tout était éparpillé, a-t-il raconté. "C'était des moments vraiment effrayants. J'espère vraiment que tout le monde va bien."

- "Déclaration de guerre" -

Vendredi matin, Israël, disant disposer de renseignements prouvant que Téhéran s'approchait du "point de non-retour" vers la bombe atomique, a lancé une attaque massive sur le territoire iranien, visant plus de 200 sites militaires et nucléaires et tuant les plus hauts gradés du pays.

L'attaque, qui a aussi visé des immeubles résidentiels, a fait 78 morts et plus de 320 blessés dont une "large majorité de civils", selon le représentant iranien à l'ONU Amir Saeid Iravani.

En Israël, les frappes ont fait "environ 40 blessés et une femme est décédée", a précisé l'ambassadeur Leiter.

L'attaque israélienne fait suite à des pressions grandissantes sur l'Iran, soupçonné par les Occidentaux et par Israël de vouloir se doter de l'arme atomique. Téhéran dément et défend son droit à développer un programme nucléaire civil.

Elle intervient aussi à deux jours d'un nouveau cycle de négociations indirectes, dont la tenue est désormais incertaine, prévu dimanche à Oman entre Téhéran et Washington sur le programme nucléaire iranien.

Malgré les appels à la désescalade lancés par la communauté internationale, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a déjà averti qu'il y en aurait "plus à venir", tandis que le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, a dénoncé une "déclaration de guerre".

- Fumée près de l'aéroport -

A Téhéran, les médias locaux ont fait état samedi matin d'une explosion près de l'aéroport de Mehrabad, dans l'ouest de la capitale. Un journaliste de l'AFP a vu des flammes et des colonnes de fumée s'élever de la zone de l'aéroport, spécialisé dans les vols intérieurs et régionaux.  

Auparavant, de fortes explosions avaient été entendues ailleurs dans la capitale, alors que la défense anti-aérienne était activée, selon l'agence officielle Irna, contre de nouvelles frappes israéliennes.

"Assez de l'escalade, il est temps que ça cesse. La paix et la diplomatie doivent l'emporter", a plaidé le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres sur X.

Dans la soirée, une foule s'était rassemblée dans le centre de Téhéran en soutien aux ripostes du régime, aux cris de "Mort à Israël, mort à l'Amérique!". 

"Nous continuerons à répondre de façon écrasante (à Israël) avec le soutien de notre peuple, de notre chef et de nos courageux soldats", a affirmé à l'AFP Khatira Abolfazli, une infirmière de 40 ans.

Dans le centre, les rues étaient désertes à l'exception de files d'attente devant les stations-service.

- Arsenal de missiles -

Dans un message vidéo adressé à la population iranienne, Benjamin Netanyahu a averti qu'elle devait s'attendre à davantage de frappes, les appelant à se révolter contre le "régime maléfique et oppressif" qui les gouverne.

"Nous avons éliminé les principaux commandants militaires, des scientifiques nucléaires de haut niveau, l'installation d'enrichissement (d'uranium) la plus importante du régime islamique et une grande partie de son arsenal de missiles balistiques", a précisé le Premier ministre israélien, 

L'armée israélienne a annoncé avoir "démantelé" une usine d'uranium à Ispahan (centre). Les dégâts sur ces installations comme sur le site de Fordo, au sud de Téhéran, sont mineurs, selon l'organisation iranienne du nucléaire.

Israël a aussi annoncé avoir frappé deux bases militaires dans l'ouest de l'Iran, affirmant que celle de Tabriz (nord-ouest) avait aussi été "démantelée".

Le centre pilote d'enrichissement d'uranium de Natanz (centre) a été visé "plusieurs fois", selon la télévision d'Etat iranienne, qui a montré une épaisse fumée au-dessus de ses installations. 

L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a déclaré que la partie en surface avait été "détruite", citant des informations iraniennes, mais "aucune augmentation des niveaux de radiation" n'avait été observée. 

- "Encore plus brutales" -

Tôt vendredi, le général Hossein Salami, chef des Gardiens de la Révolution, ainsi que d'autres responsables dont le commandant de la force aérospatiale des Gardiens, Amirali Hajizadeh, ont été tués dans une frappe sur leur quartier général. 

Le chef d'état-major iranien, le général Mohammad Bagheri, et six scientifiques du programme nucléaire iranien ont également péri dans des frappes.

Le président américain Donald Trump, qui s'est entretenu vendredi avec Benjamin Netanyahu, a exhorté l'Iran à "conclure un accord" sur le nucléaire et prévenu que les "prochaines attaques" seraient "encore plus brutales". 

Téhéran avait menacé mercredi de frapper les bases militaires américaines au Moyen-Orient en cas de conflit après un éventuel échec des négociations en cours, visant à encadrer le programme nucléaire iranien en échange d'une levée des lourdes sanctions frappant l'Iran.

La dernière attaque israélienne contre l'Iran annoncée publiquement remonte à octobre 2024, quand Israël avait dit avoir mené des raids aériens sur des cibles militaires en représailles au tir de quelque 200 missiles iraniens vers son territoire.

Signe de l'extrême fébrilité dans la région, de nombreuses compagnies aériennes ont supprimé ou dérouté des dizaines de vols, tandis que les cours du pétrole ont flambé.