Dix jours après l'élection de la député insoumise Aurélie Trouvé à la présidence de la Commission des Affaires économiques, nouvelle "paume" au Palais-Bourbon. 

Pour remplacer la LR Annie Genevard nommée au gouvernement, les députés, après trois tours de scrutin, ont élu mardi soir le député écologiste Jérémie Iordanoff, qui a devancé de 14 voix la candidate LR soutenue par le camp présidentiel, Virginie Duby-Muller.

Même cause, mêmes effets. Et jeu perdant-perdant pour le "socle commun" à l'Assemblée. Pour les LR, qui perdent une vice-présidence malgré le profil très "Macron-compatible" de la députée de Haute-Savoie. 

Pour le camp présidentiel qui, empêtré dans sa querelle avec le groupe de Laurent Wauquiez, s'est au demeurant divisé, avec la candidature au deux premiers tours de Christophe Blanchet qui a ratissé bien au delà de son seul groupe MoDem.

Chez Ensemble pour la République (EPR), Gabriel Attal avait pourtant battu le rappel en faveur de la candidate LR. Dans la matinée, l'ancien Premier ministre avait assuré cette position à Matignon devant son successeur, Michel Barnier, et les autres cadres du "socle commun". 

Consigne avait été donnée d'outrepasser la rancœur contre LR après l'épisode Aurélie Trouvé.

"Le MoDem ne nous aide pas sur ce coup-là", a-t-on regretté mardi soir dans l'entourage de Gabriel Attal.

"Je sens bien qu'on va nous faire porter tous les chapeaux de la terre", a ironisé le président du groupe MoDem, Marc Fesneau. Le parti centriste, déjà victime des premiers atermoiements du fameux "socle commun" en juillet, a présenté son candidat. 

"M. Attal a dit à ses troupes de voter pour les LR et pas pour le MoDem (...) C'est un mauvais axe pour M. Attal, qui vient du PS, avec des gens (LR, NDLR) qui demain lui taperont dessus", a cinglé le député MoDem Richard Ramos.

- Coalition sans contrat -

C'est le paradoxe de cette Assemblée issue d'une dissolution décidée un soir de juin à l’Élysée: ce "socle", allant des soutiens d'Emmanuel Macron - Renaissance, MoDem, Horizons - aux Républicains (LR) en passant par une partie du groupe centriste Liot s'est formé pour assurer la réélection au perchoir de la macroniste Yaël Braun-Pivet, et servir de base à la nomination à Matignon de Michel Barnier. Voilà la gauche écartée.

Mais depuis lors, c'est le grand désaccord, sur la répartition des postes à l'Assemblée, l'attitude envers le gouvernement Barnier ou encore pour l'examen du budget.

Une coalition sans contrat de coalition. Dont la fragilité apparaît vote après vote au Palais-Bourbon, alors qu'a débuté l'examen du budget, à qui l'ensemble des observateurs promettent une adoption par 49.3.

Revenus comme par miracle au pouvoir dont ils étaient éloignés depuis douze ans, les LR jouent les bons élèves. "On ne joue pas à +si vous ne nous suivez pas, on vote la censure+, on ne joue pas à +si vous n’augmentez pas mon budget, je démissionne+. On essaie d’être solide dans la période", explique l'un d'eux, dans une claire allusion aux députés et ministres macronistes.

Mais pas question pour autant de défendre le bilan d'Emmanuel Macron. Et le groupe LR repris en main par Laurent Wauquiez s'estime lésé depuis le mois de juillet. Se juge désormais sous-représenté aux postes importants de l'Assemblée. Et accuse même Gabriel Attal et les macronistes d'avoir "dealé avec le RN".

Côté présidentiel, l'équation est encore plus complexe. En froid avec l’Élysée, mais confortablement élu président de groupe par ses pairs députés, Gabriel Attal joue une partition délicate: soutenir Michel Barnier, qui ne l'épargne guère, tout en défendant le bilan de sept ans de macronisme au gouvernement.

"Certaines de ses décisions, il les prend plus pour garder son groupe ensemble qu'autre chose", juge une figure du Palais-Bourbon. Le président du groupe Ensemble pour la République (EPR) n'a pas que des soutiens chez les macronistes. Lui qui juge au contraire que sa présence à la tête du groupe a permis de maintenir l'unité, menacée après les législatives, et devrait probablement concourir face à Elisabeth Borne pour la direction du parti Renaissance.

"Ne tombons pas dans le piège des LR", insiste-t-on mardi dans l'entourage de Gabriel Attal.