Syndicats et patronat avaient à coeur de s'accorder pour éviter que le gouvernement ne reprenne la main, comme l'avait fait au printemps le gouvernement Attal après l'échec des négociations sur les seniors, publiant un décret - depuis abandonné - dont les syndicats avaient unanimement dénoncé la "violence".
"Cela démontre que la méthode, qui est celle du Premier ministre de laisser la place au dialogue social, porte ses fruits", a estimé vendredi matin la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, sur Franceinfo.
"Aujourd'hui, on a des organisations syndicales qui ont fini par trouver un accord" et "évidemment on le salue", a-t-elle poursuivi, précisant que le Premier ministre s'exprimera vendredi après-midi sur ce dossier.
A l'issue d'une négociation "flash" de quelque semaines, tenue dans un contexte de recherche d'économies, les partenaires sociaux ont négocié à la fois les nouvelles règles d'indemnisation des chômeurs, qui doivent s'appliquer à compter du 1er janvier, les mesures pour favoriser l'emploi des seniors, ainsi qu'un accord surprise sur le dialogue social.
La délégation CFDT a donné "un avis favorable sur les trois textes", a indiqué dans la nuit son négociateur Olivier Guivarch, comme la CFTC, selon son représentant, Frédéric Belouze.
La CGT, deuxième centrale syndicale, s'est montrée nettement plus réticente, la négociatrice Sandrine Mourey déplorant que sur l'assurance chômage, "ça tape dur", et pointant sur l'emploi des seniors "des petits mais pas de gros gains" pour les salariés.
La CFE-CGC a précisé qu'elle ne signerait pas l'accord sur l'assurance chômage mais les deux autres; tandis que FO réserve son appréciation.
Les syndicats doivent encore formellement consulter leurs instances avant validation de ces accords.
- 2,3 milliards d'euros d'économie -
Le texte assurance chômage, prévu pour quatre ans, est un avenant à l'accord de novembre 2023 - signé par la CFDT, FO et la CFTC, mais non validé par le gouvernement. Il prévoit notamment, pour dégager des économies, de diminuer l'indemnisation des chômeurs frontaliers ayant travaillé en Suisse, Belgique, Allemagne ou au Luxembourg.
Leurs droits sont aujourd'hui calculés sur la base de leur salaires dans ces pays, nettement plus élevés qu'en France.
Un relèvement de deux ans des bornes d'âge ouvrant droit à une indemnisation plus longue, pour prendre en compte la réforme des retraites que les syndicats contestent, est également prévu.
Le palier ouvrant droit à 22,5 mois d'indemnisation au maximum passe ainsi de 53 à 55 ans et celui donnant droit à 27 mois de 55 à 57 ans. La mesure devrait rapporter 350 millions sur quatre ans.
Pour se rapprocher des 400 millions d'euros d'économies supplémentaires demandées dès 2025 aux partenaires sociaux par le gouvernement, le patronat a accepté que la réduction de 4,05% à 4% de la cotisation employeur à l'assurance chômage n'intervienne qu'au 1er mai 2025.
Au global, les nouvelles règles permettraient de dégager quelque 2,3 milliards d'économie sur quatre ans pour le régime de l'assurance chômage, selon un calcul de l'Unédic.
Sur le volet emploi des seniors, le patronat a lâché du lest en renonçant dans l'immédiat à une exonération progressive de cotisations d'assurance chômage pour l'employeur qui recruterait un salarié en "contrat de valorisation de l'expérience", une mesure portée par la CPME.
Ce nouveau contrat spécifique aux seniors, pour faciliter l'embauche des chômeurs âgés, subsiste néanmoins. Le salarié pourra être mis d'office à la retraite dès qu'il aura droit à une retraite à taux plein.
Le texte entend aussi favoriser les retraites progressives, peu répandues.
Accessible à partir de 60 ans et permettant au salarié de travailler à temps partiel tout en continuant à cotiser à taux plein pour sa retraite, le dispositif ne devient pas pour autant un droit auquel l'employeur ne pourrait plus s'opposer, comme l'auraient voulu les syndicats.
Le troisième accord, "tombé un peu du ciel", dixit un négociateur, vise à ouvrir des discussions sur les parcours syndicaux et demander au gouvernement de légiférer pour permettre d'exercer plus de trois mandats pour les représentants du personnel.