Quelle mouche a piqué Tim Cook, le patron d'Apple ? C'est la question que se posaient vendredi les investisseurs à la lecture de la presse anglo-saxonne, annonçant qu'Apple avait l'intention d'acheter les casques Beats pour 3,2 milliards de dollars. L'opération pourrait être confirmée dès cette semaine, indique le « Wall Street Journal ». Même si le groupe a récemment indiqué qu'il avait racheté 24 sociétés en dix-huit mois, il n'a communiqué sur aucune de ces transactions de taille plutôt marginale. Le rachat de Beats, qui signerait la plus grosse acquisition du groupe, marquerait une nouvelle ère pour Apple, qui s'est fait tout seul, en créant et en vendant uniquement des produits à ses couleurs. « C'est une opération inhabituelle. Là, ils achèteraient une marque plutôt qu'une technologie », remarque Benoît Flamant, gérant de fonds high-tech chez Fourpoints.

Rattraper un retard

Le vétéran de la musique Jimmy Iovine et le producteur de hip-hop Dr. Dre, fondateurs de Beats, pourraient rejoindre Apple. Dans un premier temps, la start-up, qui aurait encaissé 1,2 milliard de dollars de revenus l'an passé, devrait gonfler les ventes et le résultat des magasins Apple Store, qui accueillent de plus en plus de produits non Apple. « Les coûts fixes du réseau sont importants », note Benoît Flamant. La firme à la pomme a généré un chiffre d'affaires dans ses magasins de 20,22 milliards de dollars en 2013, en hausse de 7,4 % sur un an et de 9,3 milliards de dollars (+ 23,5 %) sur son site Internet, selon eMarketer. Apple mettrait aussi la main sur la plate-forme de streaming récemment créée par Beats. Une façon de rattraper son retard sur le modèle qui monte dans la musique. Progressivement, le streaming et l'abonnement remplacent en effet l'achat à l'acte et le téléchargement, qui ont longtemps fait le succès d'iTunes. Aux Etats-Unis, les ventes d'albums sur Internet ont stagné l'an passé et l'achat à l'unité a reculé de 6 %.Avec Beats se pose à nouveau la question de l'avenir d'Apple, resté en point d'interrogation depuis la mort de Steve Jobs en 2011. Faut-il y voir un virage à 180 degrés ? Beats et Apple ont un point commun : tous deux occupent le créneau des produits high-tech de luxe. En embauchant, à la tête de ses Apple Store, Angela Ahrendts, l'ancienne star de Burberry, Apple n'a fait que conforter ce positionnement. Et l'écart entre ses onéreux iPhone et iPad et le reste du marché devrait continuer de se creuser, les prix ne cessant de baisser sur les smartphones et les tablettes tournant sous Android. Reste à savoir quelle est la taille du segment du luxe dans la high-tech, et s'il n'y a pas un risque de voir Apple se marginaliser, comme il le fut longtemps dans l'informatique grand public avec ses Mac face à Windows.