Signe ou pas d'un début d'inflexion de sa part, le chef du gouvernement allemand n'a pas réaffirmé mardi sa prétention à candidater à sa propre succession lors du scrutin, lors d'une conférence de presse à Rio en marge du G20, alors qu'il était directement interrogé sur le sujet.

"Nous voulons réussir ensemble", a-t-il répondu de manière évasive. "J'ai déjà dit que nous voulions gagner et c'est ce que je souligne ici encore une fois, ensemble, moi et le SPD", a-t-il ajouté.

Et pour cause: plusieurs membres influents du parti social-démocrate (SPD) ont remis en cause en Allemagne sa candidature à un second mandat.

Après l'un des "dinosaures" du parti, Franz Müntefering, ce week-end, l'ancien chef du SPD Norbert Walter-Borjans a réclamé mardi "une clarification rapide" de la question, suivi par plusieurs députés et les "Jusos", l'organisation de jeunesse du SPD. 

L'attaque la plus lourde a été portée par deux élus sociaux-démocrates très influents, Wiebke Esdar et Dirk Wiese car venant du "fief" du parti, la région de Rhénanie du Nord-Westphalie, dans l'ouest.

Ces derniers constatent l'image endommagée du chancelier après l'échec de sa coalition avec les Verts et les libéraux et disent "entendre beaucoup d'approbation" au sein du parti en faveur de Boris Pistorius, le ministre de la Défense, champion des sondages toutes couleurs politiques confondues.

- "Ne pas détruire" son chancelier -

Connu pour être particulièrement têtu, Olaf Scholz, vainqueur surprise de l'élection de 2021, répétait jusqu'ici qu'il était persuadé de mener de nouveau son parti à la victoire au scrutin du 23 février 2025.

Désormais à la tête d'un gouvernement minoritaire avec les écologistes, il va se soumettre le 16 décembre à un vote de confiance au Bundestag qu'il devrait perdre, ce qui ouvrira la voie aux législatives anticipées.

Jusqu'ici, il bénéficie toujours du soutien de la direction du parti. L'ancien dirigeant Gerhard Schröder (1998-2005), très controversé en raison de sa proximité avec Vladimir Poutine, est aussi venu à sa rescousse. "Le parti ne peut quand même pas détruire son propre chancelier", a-t-il dit mardi au quotidien Süddeutsche Zeitung.

Mais les sondages accablent Olaf Scholz. Dans le baromètre représentatif de popularité Insa publié mardi par le quotidien Bild, il rétrograde de la 19e à la 20e et dernière place, tandis que Boris Pistorius reste en tête du classement.

Et dans la dernière étude de l'institut Forsa, le SPD plafonne à 15% des intentions de vote, loin de son score de 25,7% obtenu aux élections de 2021.

Les conservateurs de la CDU/CSU affichent 33% et le parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD), 18%.

- "Profondément loyal" -

L'énergique Boris Pistorius, 64 ans, qui se décrit comme "un homme profondément loyal", a endossé à ce stade la ligne officielle du parti, sans exclure quoi que ce soit.  

"La seule chose que je peux exclure de façon définitive est de devenir pape un jour", a-t-il plaisanté lundi soir.

Mais un changement de candidat n'a rien d'évident.

Boris Pistorius "n'a aucune compétence en matière d'économie. Or c'est précisément ce thème qui devrait faire pencher la balance cette fois-ci", alors que la première économie européenne traverse une grave crise industrielle et s'apprête à accuser cette année sa deuxième récession d'affilée, pointe la chaîne de télévision n-tv dans un commentaire.

L'ancien élu régional de Basse-Saxe, classé dans le camp "des sociaux-démocrates conservateurs", est par ailleurs un fervent partisan d'une aide accrue à l'Ukraine contre l'invasion russe et d'une modernisation à marche forcée de la Bundeswehr, l'armée allemande.

Cette position ne fait pas l'unanimité dans un SPD toujours imprégné de pacifisme, un sentiment très répandu en Allemagne depuis les horreurs du nazisme.

Et si le rival Boris Pistorius devait au final porter les couleurs du parti, au vu des sondages, il paraît difficile qu'il puisse renverser complètement la tendance actuelle pour permettre au SPD de garder la chancellerie.